En septembre dernier, Boulbar partait sillonner l’Amérique profonde pour y préparer un nouvel album sous forme de carnet de voyage. Aujourd’hui, les premières chansons sont prêtes. Nous en avons eu un avant goût lors d’un set à la Maroquinerie.
Bonne nouvelle : Boulbar sait tout aussi bien relater une fiction que la réalité. Après le destin imaginaire de Jack Ranieri dans son précédent album Requiem pour un Champion, l’artiste nous décrit cette fois son « errance américaine », faite de tranches de vie à mesure des étapes dans les motels qu’il a habités.
Tout ou presque a été fait sur place. Le style musical reste dans la lignée de Requiem pour un Champion : les arrangements sobres, faisant la part belle à la guitare, mettent en valeur des textes finement écrits. Une certaine vision de l’Amérique d’aujourd’hui.
Sur scène, Boulbar avait déjà inauguré lors de ses précédentes prestations le concept de concert illustré. L’album CD de Requiem pour un Champion était sorti conjointement avec un album BD, signé Vincent Gravé. La mise en scène mêlait l’image à la musique. Cette fois, le duo a décidé de pousser plus loin ce principe. Vincent Gravé dessinera en direct sur scène sur toutes les dates à venir.
En pratique, le résultat s’avère plus que convaincant. Vincent Gravé mêle habilement les techniques (colorisation de photos en noir et blanc, dessin à l’encre de Chine, jeu de découpes avec un carton placé sur un écran d’ordinateur…) pour que le spectateur soit surpris à chaque nouveau titre. A la Maroquinerie, ces images étaient retransmises sur un écran (qui ne satisfaisait pas les artistes), rappelant les premières élucubrations lumineuses des Pink Floyd avec des diapositives. La mise en scène a assurément du potentiel : on regarde autant qu’on écoute !
Laissons maintenant la parole aux artistes :
SMB : Pourquoi ce projet ?
Bertrand Boulbar : Musicalement, c’est une idée qui me trottait dans la tête depuis longtemps. Déjà avant Requiem pour un Champion. Il y a ce côté typique des chambres d’hôtel US, j’avais envie de tout faire de A à Z sur place. Yvan (Taïeb, le producteur, NDLR) a financé le voyage. Je n’ai fait que finaliser les titres dans mon home studio. Requiem était une fiction. J’avais envie de faire de Motor Hotel un disque reportage.
SMB : Quelles différences par rapport à ton précédent voyage ?
BB : Cette fois, ça a été une succession d’étapes. C’est allé de New-York jusqu’au fin fond de l’Amérique traditionnelle. Du coup, j’ai eu deux visions totalement différentes de San-Francisco. Lors de mon premier voyage, j’ai vraiment trouvé le côté mythique auquel je m’attendais. Cette fois, après ma traversée de toutes ces régions, j’ai trouvé San Francisco un peu artificielle, cliché. J’ai l’impression que la ville s’est embourgeoisée, je n’ai pas retrouvé ce côté mythique de la première fois, j’ai été un peu déçu.
SMB : Si tu devais garder un souvenir de ce voyage ?
BB : Déjà, l’immensité des paysages. En particulier dans le Nevada. C’est toujours impressionnant de voir une ville fantôme. Ensuite, il y a eu un sentiment de solitude. En particulier certains dimanche après-midi, quand on est dans un motel coincé entre une station service et un commerce de pneus. Pendant un moment, j’ai pensé partir avec Vincent (Gravé), mais je n’aurais pas eu la même perception, pas fait les mêmes rencontres. Quand on est seul, même quand on parle mal anglais, on est obligé d’aller au-devant des gens.
SMB : Les contrées traversées t’ont-elles inspirées par leur passé musical ?
BB : Pas tant que ça. Bien sûr, quand on arrive dans des endroits comme Nashville, on ne peut pas ignorer la culture et le style particulier de l’endroit. Mais je chante en français et pour moi, ça ne colle pas avec un style country. Donc j’ai renoncé à certains styles. Ce n’est pas tant la culture et le passé de l’endroit qui m’ont inspiré, mais plutôt le lieu tel qu’il était quand je l’ai traversé. Ca a donc plus influencé le texte que la musique. Bien sûr, dans la voiture la musique m’a également imprégné. J’avais emporté des CD mais j’écoutais aussi la radio. J’ai écouté beaucoup de folk.
SMB : Quelles différences as-tu trouvé entre les stéréotypes avec lesquels tu es parti et la réalité ?
BB : C’est un pays qui correspond beaucoup à ses clichés. Il y a ce côté mythique qu’on peut voir au cinéma, avec les chambres de motel délabrées.
SMB : Vincent, quel est ton rôle dans le projet Motor Hotel ?
Vincent Gravé : Cette fois-ci, pas d’album. Je me cantonne à la scène. Le but est de faire uniquement des images mentales. Je cherche à créer une interaction entre la chanson et le dessin, un duo entre image et son. On en revient un peu au cinéma muet mais la projection du film serait remplacée par l’image de mon chevalet. Et puis on voulait une formule qu’on pouvait transporter facilement en tournée. Là, je viens avec mes affaires et il n’y a pas besoin d’une infrastructure sur place. Mon envie de monter sur scène vient de Requiem. On a fait quelques Fnac en concert illustré, où je dessinais en direct. La technologie le permet et on a trouvé une formule assez rock. On arrive et on joue, c’est un peu comme une séance de dédicace.
L’album est prévu pour septembre. Nous vous en reparlerons en temps voulu ! Deux titres sont déjà à l’écoute sur le site de Boulbar.
Ne manquez pas notre galerie FlickR du concert de Boulbar.
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