Attendre son train en gare, voilà bien un sujet d’actualité. Cet instant normal et un peu inutile se trouve prolongé par les grèves actuelles. La patience en gare et comment tuer le temps sont devenus des activités à la mode.
Il y a gare et gare. Se peler les roudoudous sur le quai de la station d’Houstoupilou-les-Bains-de-Pieds laisse peu d’alternative. Pas de café, pas de presse et même pas de 3G pour faire joujou avec votre smartphone. Non, quitte à attendre le train, il faut le faire dans une vraie grande gare. Une gare à la Dutronc quand il chante « Puisque vous partez en voyage ».
Si possible choisissez-la avec une grande verrière. De celles qui vous rappellent les voyages du début du siècle dernier et l’Orient Express. De toutes façons, verrière ou pas verrière, ce qu’il y a à faire reste toujours la même chose.
Déjà, un petit tour à la presse. Vous pestez sur le fait que le dernier numéro de Vogue est soigneusement enrubanné dans sa cape de plastique transparent. Impossible de le feuilleter en douce pour tuer les minutes à venir. Comme vous n’avez pas envie de vous rabattre sur Pèche à la Mouche Magazine, vous vous résolvez à sortir un billet de cinq euros de votre portefeuille.
Lestée de vos deux kilogrammes de papier glacé, vous déambulez face aux quais, le pas indécis, jusqu’à ce que vous yeux rencontrent l’enseigne d’une célèbre chaîne de café/pâtissier. Vous vous dites qu’un capuccino ne vous fera pas de mal ; vous n’êtes pas encore totalement réveillée, l’heure indue à laquelle vous avez dû vous extraire de votre doux plumard en vue d’avoir une infime chance d’attraper ce train n’y est pas étrangère.
Vous commandez donc ce capuccino, un peu cher : c’est la rançon des lieux fréquentés (gares, aéroports, parc d’expositions…). Il vous reste une grosse demi-heure à tuer. Stratégiquement, vous avez choisi une place offrant une vue imprenable sur le panneau d’affichage. En cinq minutes, votre capuccino est expédié.
Il est alors temps de décapuchonner Vogue pour voir comment s’est habillée Alexa Chung à la dernière fashion week. Une fois l’information capitale trouvée, vous feuilletez très vite le magazine. Décidemment, une table de café de gare n’est pas le lieu pour cela. Et puis vous avez acheté ce magazine pour tuer un autre temps perdu : celui dans le train. Il faut trouver autre chose…
De dépit, vous espérez qu’enfin l’affichage indique votre voie de départ. Peine perdue. Toutefois, votre regard s’attarde sur les diverses destinations : Pau, Genève, Lyon… C’est un peu comme un aéroport en moins exotique. Encore que certains noms vous soient inconnus… Irun, Latour-de-Carol… Latour-de-Carol ? Et vous qui croyiez que cette ville n’existait que dans la chanson de Brigitte Fontaine. Vite, vous sortez votre smartphone pour un tour sur Wikipedia. Votre curiosité culturelle est satisfaite à l’instant même où s’affiche que vous partirez de la voie 16. Vous vous levez en vous remémorant les paroles « Monsieur le chef de gare. Monsieur le chef de gare de la Tour de Carol. Je voulais vous dire… Merci pour le gilet. »
1 Comment
Agnès
18 octobre 2010 at 21:19Une petite chanson pour la route car chianlie en gare rime parfois avec jolie rencontre …
« (…) Je vous ai aperçu
Salle des pas perdus
Un soir, était-ce à Saint-Lazare ?
Avec une inconnue
Coiffée d’un fichu, jacquard
Vous portiez sa guitare (…)
Et de n’avoir pas su
Salle des pas perdus
Vous dire quel était mon désir
Je serais à la terrasse
Du café d’en face
Ce soir à dix heures moins le quart »
Coralie Clément, Salle des pas perdus