La grève, c’est bien. (Si, si)

Aussi sûrement qu’un rhume accompagnera toujours l’hiver (notez que j’ai évité de parler de grippe), les grèves accompagneront toujours une année scolaire. Quand ce ne sont pas les étudiants qui bloquent (et tagguent) les facs de la France entière pendant des semaines, ce sont les transports en commun qui sont aux abonnés absents. Pour les gens sérieux et honnêtes, c’est le moment de se demander pourquoi ils paient un abonnement pas forcément bon marché… Mais voilà, là n’est pas le sujet, il n’est pas question ici d’exposer des arguments pour ou contre les grèves (mais vous pouvez vous lâcher dans les commentaires chers lecteurs), il est plutôt question de savoir comment on survit au virus de la grève. Oui, j’ai bien dit virus. Et contre celui-ci, rien ne sert de se laver les mains après chaque éternuement -dans le coude !-  et de jeter son mouchoir après chaque utilisation pour s’en protéger. Ce virus-là ne tue pas physiquement, il tue moralement. A moins d’adopter la positive attitude !

Démonstration :

Positivation n°1 : grâce à la grève tu marcheras plus et feras plaisir au Ministère de la Santé (et à la Sécurité Sociale aussi).

Pour quelqu’un comme moi qui pense que sport est synonyme de mort, c’est l’occasion ou jamais de bouger sa graisse ! Le but inavoué : la faire diminuer par la même occasion. En effet, une bonne alimentation n’est pas tout, il faut aussi entretenir ses muscles et quand on est étudiante, ce n’est pas chose facile. Ecrire et réfléchir ne sont pas considérés comme du sport, alors hop hop hop, on prend son courage à deux mains et deux pieds et on se lève un peu plus tôt pour marcher jusqu’à la fac. Vous pourrez alors vous moquer de ceux qui sont coincés comme des sardines dans le seul tram de l’heure et de ceux qui attendent pendant une heure à l’arrêt, forcés de laisser passer plusieurs trams, bourrés à bloc de ceux qui refusent de marcher.

Positivation n°2 : grâce à la grève tu apprécieras ton environnement et tu feras plaisir à Nicolas Hulot, Catherine Laborde et tous ceux qui te bassinent avec « La Planète » (et tu verras défiler devant toi le nombre de litres de carburants que ton chauffeur de bus économise en te faisant marcher).

Marcher, c’est aussi l’occasion d’apprécier différemment le paysage, vous ne trouvez pas ? C’est alors que l’on profite des oiseaux qui chantent, des rayons du soleil encore chauds, du CO2 des pots d’échappement… euh, non. On en oublie aussi l’odeur peu agréable des bus et trams, colonisés par des gens fraîchement douchés certes, mais aussi fraîchement trempés de sueur. La chaleur animale des espaces clos, très peu pour moi. Marcher, c’est aussi un bon moyen d’éviter les énervés habituels qui mettent leur portable à fond, croyant que le monde entier a envie de connaître leurs goûts musicaux, et pour ceux qui préfèrent parler, leur vie. Existentiel de savoir que Henry a trompé Gertrude avec Marinette alors que la première était à l’aquagym. Quand il s’agit d’adolescents, on apprend que Mme Truche, prof de maths reconvertie à la dictature, a mis une « caisse » à Paul parce qu’il n’a pas accepté de nettoyer le tableau interactif.

Positivation n°3 : grâce à la grève, tu auras plus de considération pour les commerces de proximité (et tu feras plaisir à ton banquier, qui verras tes agios littéralement péter le plafond).

Les courses. Sujet très douloureux, celui-là. L’arrêt de bus juste devant chez vous ne sert plus à rien puisqu’il n’est plus desservi et qu’il ne le sera plus jusqu’à Noël (au mieux). C’est dans ce genre de moments qu’on est heureux de vivre seule et de ne pas avoir tant que ça à acheter (s’il vous fallait un argument positif au célibat, le voilà) ! Ou alors c’est l’occasion de faire un régime, du portefeuille et de la nourriture. Le grand centre commercial est très alléchant parce qu’il propose plus de choix et une galerie commerciale plutôt bien fournie, mais il est loin et ça signifie une plus longue marche et des mains douloureuses. Le petit magasin à 10 minutes à pieds de chez vous semble alors très intéressant, même s’il est plus cher (et on en revient au régime). Alors non seulement vous faites quelque chose pour votre santé, mais en plus vous vous battez contre la crise économique ! Mais vous êtes fabuleuse, que diantre !

Positivation n°4 : grâce à la grève, tu redécouvres ta vidéothèque Disney (et tu fais plaisir à ton magnétoscope, qui commençait à s’ennuyer un peu).

Dans « vie étudiante » et vie tout court, il n’y a bien sûr pas que les cours ou le travail, mais aussi les sorties. Celles-ci sont malheureusement rendues impossibles par une grève à rallonge (tout le monde aura compris de quelle ville je parle) et c’est ainsi que l’étudiante aimant sortir et rencontrer du monde se retrouve cloîtrée chez elle, à devoir entendre comme le monde normal (comprenez : ceux qui possèdent un moyen de transport autre que les pieds) fait la fête. Entre le voisin qui invite une douzaine de potes dans un 20m² et les hurluberlus qui hurlent jusqu’à 3 heures du matin, c’est dur de se faire une raison quand on sait qu’il y a au moins une dizaine de théâtres, d’opéras, de salles de cinéma ou de bars qui proposent justement ce qu’il faudrait pour détendre une pauvre âme étudiante qui subit des heures de cours très fatigantes ! C’est là qu’intervient Disney, Walt de son prénom. Avouez que Le Roi Lion est aussi votre préféré.

Positivation n°5 : grâce à la grève tu n’as plus de retard dans ton travail (et tu fais plaisir à tes amis qui possèdent une voiture et qui n’ont pas le temps de faire leurs devoirs).

Les vendredis et samedis soirs que vous passez seule avec Mufasa, Ariel et Peter (sans oublier Mulan, Merlin et Taram), vous pouvez alors les consacrer aussi à vos devoirs. Laissés-pour-compte habituellement, les devoirs et le ménage en deviennent soudainement très intéressants ! Votre appartement est alors tellement bien rangé que vous faites concurrence à Valérie Damidot. Dont vous regardez toutes les rediffusions de D&Co entre Tarzan et Aladdin. D’ailleurs, vous n’auriez jamais su que Valérie Damidot était devenue actrice s’il n’y avait pas eu la grève.

Allez, avouez-le, vous aimez les grèves ! Vous en redemandez ! C’est comme avec Save My Brain, on ne peut plus s’en passer ! Sans elles, la vie n’aurait plus de sens, elle serait bien trop simple, bien trop tranquille ! Vous auriez des amis qui ne vous demanderaient pas juste de leur passer les cours suite à un réveil difficile de lendemain de beuverie, vous auriez des activités extrascolaires qui vous empêcheraient de faire vos devoirs seule devant votre écran d’ordinateur à devoir assister manu-muros-trop-fin aux ébats de votre voisin, bref, vous seriez heureuse sans grève. Non, nous ne voulons pas être heureux. Nous voulons avoir des ampoules aux pieds.