Ce n’est, en général, pas une réflexion que j’ai l’habitude de me faire ou même que j’ai l’habitude d’entendre. ELLE a cependant réussi à me faire douter de moins rien que l’espace d’une minute. Ca fait bien des années que j’ai passé le stade des complexes, mais à la simple lecture de cet article je suis retombée en adolescence, lorsque je me cachais sous des kilomètres de tissu pour ne pas qu’on voit mes formes féminines. J’imagine alors les dégâts que peut engendrer un tel article sur une adolescente ou une adulte mal dans sa peau…
Je suis grosse. Enfin ça, c’est ELLE qui le dit. Mais oui, vous ne saviez donc pas ? Tout ce qui passe au-dessus de la taille 38 est, je cite« bien en chair » et « ronde ». Je fais du 40 donc je suis bien en chair et ronde. Ce qui médicalement parlant est une aberration régit le monde de la mode, mais ça c’était connu depuis longtemps. Ce qu’on connaissait moins, c’est qu’un magazine féminin pousse ouvertement à la marginalisation de toutes les femmes qui portent au-dessus de 38, en les catégorisant arbitrairement de « ronde » et « bien en chair ». Ainsi la beauté n’est plus une question de bien-être et de santé, mais une question de taille de vêtements.
Ce que font ces magazines, et ELLE en ligne de mire suite à son article sur « les rondes », c’est pousser des jeunes filles et femmes à se sentir d’autant plus complexées face à leur miroir et anormales. Les filles plates, sans formes et façon cure dent sont devenues la norme et non plus l’exception, une femme qui a des rondeurs est considérée comme grosse et hors norme. Faut-il rappeler à ELLE et à la mode en général qu’une femme a des courbes naturelles et que ce sont justement celles qui font d’elles une femme et non plus une gamine ?
La nature est faite de telle sorte qu’il existe malheureusement des différences injustes entre les femmes. Certaines pourront se goinfrer de junk food pendant des années sans prendre un gramme et d’autres devront toute leur vie faire attention et se battront contre la cellulite. Mais le bien-être ne dépend pas de ce genre de détails, bien au contraire. Et faut-il vraiment rappeler que la cellulite n’est ni une question de poids ou de nourriture, c’est une question de nature. Un mannequin peut également avoir de la cellulite, mais grâce à des logiciels de traitement d’images très efficaces, chaque détail que la mode considère comme défaut, peut être habilement effacé. Ce qui trompe évidemment le jugement de ceux et celles qui croient que la perfection existe et que le père Noël vient chaque année en traineau.
Je lisais ces magazines féminins et je n’avais jamais été particulièrement éblouie par leur attrait culturel mais ils proposaient un moment de détente sans prétention dans les transports en commun. Depuis quelques années je fuis ces magazines et je refuse de dépenser mon argent pour ces pages remplies de contradictions : un article sur les méfais de l’anorexie, à la page suivante une publicité vantant les bienfaits d’un produit amincissant… Ca se passe de commentaire. Des jeunes adolescentes manquent par contre du discernement nécessaire pour faire la part des choses et se laissent aveuglées par un corps aux proportions intenables. Ce sont elles, ces femmes qui un jour se pourriront la vie avec leurs complexes.
L’intitulé « bien en chair » dans le paragraphe d’introduction de l’article est particulièrement choquant, la plupart des magazines n’utilisant depuis longtemps plus que « bien dans sa peau ». D’ailleurs, en regard des photos des jeunes filles, je me demande bien où se trouve cette chair superflue ! L’IMC (Indice de Masse Corporelle) est apparemment également un gros mot pour ce magazine. En effet, l’indice de masse corporel est une preuve médicalement reconnue pour indiquer si oui ou non un problème de poids existe. Pour ELLE, la taille de vêtement suffirait. L’IMC des mannequins est d’ailleurs bien trop bas en général et ces jeunes filles se retrouvent très souvent dans la catégorie « Sous-poids ». Mais encore une fois, « santé » est un terme apparemment étranger pour ELLE.
ELLE, ou comment cultiver le mal-être et les préjugés sur le poids et l’apparence chez les jeunes filles et femmes, déjà beaucoup trop mises sous pression par notre société superficielle. D’après moi, ELLE a simplement fait un très mauvais choix de mots. Psychologiquement parlant, les termes de « ronde » et de « bien en chair » sont encore toujours connotés négativement. Utiliser précisément ces termes-ci était un bien mauvais calcul, et il aurait suffit d’une minute de recherche sur internet et de questionnements pour se rendre compte que cet article allait droit au mur. Mais que voulez-vous, la désinformation et les recherches mal conduites et réinterprétées sont les définitions mêmes de certaines formes de journalisme, le journalisme des magazines féminin en fait définitivement partie.
Alors soit, chers rédacteurs de ELLE. Je suis « bien en chair » et « ronde ». Ou plus simplement : je suis une femme en bonne santé.
9 Comments
Léonore
14 mars 2010 at 15:31Crystal Renn : une femme magnifique. Un bel exemple de beauté en taille 42-44.
Je la trouve bien plus belle que toutes les brindilles des défilés…
Greene Ouitche
3 mai 2009 at 23:15Quelle horeur!! Je suis révoltée! Ayant été mannequin durant 7 ans dans les années 80, je peux dire que je faisais partie des »petites » tailles et j’habillais du 40 pour 1m78. Je n’en reviens tout simplement pas de voir à quel point les proportions corporelles commencent à devenir complètement irréalisables…
Jusqu’où veulent-ils mener les jeunes femmes?? Aux dimensions de Barbie? Il a été prouvé qu’il serait impossible pour une femme en chair et en os de tenir debout avec ses proportions-là.
Je n’ai qu’une question: Les magazines féminins aiment-ils VRAIMENT les femmes?
On ne le dirait pas.
Magalie
30 avril 2009 at 20:16Hé oui, il y a encore beaucoup de travail… pourtant nous sommes en 2009!
J’ai aussi remarqué les paradoxes des magazines féminins :
– page 8 « Les rondes sont plus appréciées parce que plus joviales, maigreur = maladie… blablabla »
– page 9 : « Comment perdre 10 kilos en 4 semaines… »
Pour ma part j’ai choisi de perdre du poids, j’ai perdu 11 kilos de manière équilibrée et je fais aujourd’hui du 42. J’étais censée perdre plus mais je n’irai pas plus loin : je regrette déjà assez ma belle poitrine considérablement réduite et mes « bonnes fesses ». Je suis mieux dans ma peau c’est vrai mais je ne sacrifierai pas ma santé pour rentrer dans du 38! Il ne me resterait que la peau sur les os!
Est ce que je dois quand même prendre 2 billets pour m’asseoir dans un avion de la Compagnie discriminante Ryan Air?? A en croire ELLE, oui!
Consternant!
laurencel
30 avril 2009 at 19:04glurp, mon grand âge et mon poids me mettent d’emblée dans la catégorie des grosses et au-delà, j’ai bondi en lisant l’article et surtout les commentaires qui suivaient dans le magazine Elle, je trouve cela grave car comment dire que l’on est grosse à partir de la taille 40 !!! c’est du grand n’importe quoi mais qui peut s’avérer dangereux pour celles qui sont fragiles, et qui vont tout tenter, et du n’importe quoi, pour ne surtout pas dépasser la taille 38 ! (taille que j’ai eu, dans un passé très lointain d’ailleurs, mais bon à l’époque je cachais mes hanches avec d’informes pull overs.. déjà), aujourd’hui
je suis ronde,… enfin très ronde même et alors ! j’ai un énorme défaut, je suis gourmande…
Mais au fait, et ces messieurs de la rédaction de « save my brain » qu’en pensent ils ?
alfafa
28 avril 2009 at 23:17Tout à fait de ton avis
j’ai lu cela sur facebook il y a qq jours et j’ai piqué ma crise sur ledit réseau… ben je suis dans la catégorie « énorme » !
Dire que je me pensais juste un peu « en forme »… gloups ! Il y a peu je faisais un 38/40, ma thyroide me faisant des siennes me voici en 2 ans avec qq kilos de + (et je ne mange pas de façon déraisonnée, je suis végétarienne et ne consomme que des céréales et légumes, seulement ma thyroide en a décidé autrement et rien ne réussit à la raisonner)… me voici passée la barre fatidique du 38 et même du 40… un bon 42 (ça y est je suis bonne pour recevoir les produits minceur en tous genres… stoppez là ! je ne mange que naturel et zut, je suis une femme avec des hanches, des seins… des cuisses… comment ! mais non, ce ne sont pas des gros mots… juste des attributs féminins)
Beez à toutes les filles de + de la taille 38 (et aussi aux brindilles :-)
Lilith
28 avril 2009 at 21:22Je n’ai qu’une chose à ajouter : Les articles comme ceux publiés dans ELLE sont non seulement aberrants et insensés, mais surtout dangereux… Ca fait peur…!
gigigan
28 avril 2009 at 16:16Bienvenue dans le monde réél. Principe fondamental de la société de consommation: les gens mal dans leur peau consomment à outrance, les gens heureux non. Fin de l’histoire.
Attention les hommes acceptent (déjà) bientôt ces même clichés (autant pour eux que pour leur femmes).
On est grave dans la merde…
Etincelle
28 avril 2009 at 12:44Je suis tout à fait d’accord avec toi sur l’article de ELLE… révoltant!
Demoiselle Aux Myosotis
28 avril 2009 at 9:36Je me doutais bien que cet article allait faire des étincelles par ici, je me demandais juste quand ça allait arriver xD
C’est tellement ridicule de prendre la taille des vêtements comme critère, d’autant que la taille varie selon les différents magasins, voire les vêtements eux-mêmes : pas plus tard que la semaine dernière je suis partie en quête d’un bon vieux jean, j’en ai essayé deux modèles différents dans la même boutique et l’un m’allait en 38, l’autre en 40.
Même les filles les moins féminines (comme moi) sont parfois obsédées par leur poids.
Pendant des années j’ai mangé comme un ogre sans prendre un gramme, en étant même en sous poids de façon si visible que tout le monde se demandait si j’étais anorexique. Non non, je mangeais bien, je ne me faisais pas vomir, mais c’était comme ça. Ma mère et mes sœurs (dont la tendance est plutôt à être « bien en chair ») s’amusaient à me traiter de squelette comme pour se venger en quelques sortes. Et puis en l’espace d’un an, j’ai pris dix kilos. Dix kilos qui me permettent d’avoir un IMC tout à fait dans la moyenne, donc autant dire que je ne suis pas un ballon, même si forcément, dix kilos, ça se voit ! Bon, et bien maintenant je ne suis plus un squelette mais une grosse barrique.
Ça sera toujours comme ça. Le poids, la silhouette, les cheveux, la peau etc… se sont des choses qui se voient, des choses pour lesquelles il est facile d’imposer un canon, et qui sont ainsi plus faciles à critiquer.
J’imagine que ELLE a voulu reprendre une expression qu’ils imaginent commune dans le langage de tout les jours en présence de filles qui osent dépasser le 38 en taille de pantalon. J’imagine que c’est un très mauvais choix de communication plutôt qu’un diktat. Dommage pour eux, ils risquent d’en entendre parler pendant un moment.
Pour finir ce commentaire en mode déballage de vie, je dirais que j’ai rarement été aussi contente de moi que le jour où je suis ENFIN passée du 36 au 38 ! Surtout que le 38, c’est beaucoup plus simple à trouver en magasin que le 36 ou le 34 :p (bon, maintenant il ne me reste plus qu’à atteindre le tour de poitrine qui va bien avec, mais je crois que ce n’est pas comme ça que ça fonctionne :p)