Aujourd’hui, je vous propose de continuer notre ballade au fil du nouveau tramway en vous éclairant sur quelques noms féminins que vous pourriez croiser (et comme dit auparavant c’est plutôt rare…), alors profitons-en pour apprendre qui sont ces dames qui jalonnent notre parcours. Après l’arrêt Adrienne Bolland, arrêtons-nous chez Delphine Seyrig.
Delphine Seyrig ( 1932- 1990)
Delphine Seyrig est une actrice française de la nouvelle vague rendue cèlèbre par Alain Resnais et François Truffaut. Elle fut également réalisatrice et féministe combative.
Elle naît en 1932 à Beyrouth au Liban, d’un père archéologue, Henri Seyrig et d’une mère aventurière, Hermine de Saussure, descendante directe d’Henri de Saussure. Avec une famille comme celle-ci la petite Delphine grandit dans un contexte heureux, prompt à la curiosité, aux voyages et à la découverte d’autres cultures.
Dès l’âge de seize ans elle semble avoir trouvé sa voie et prend des cours d’art dramatique et à vingt ans décroche son premier rôle dans L’Amour en papier de Louis Ducreux. Delphine envisage de rentrer au théâtre national populaire, mais sa voix est jugée trop particulière. Elle est la comédienne à la «voix de violoncelle» comme le dit l’acteur Michael Longsdale. En effet, Delphine Seyrig c’est une présence légère, presque vaporeuse, un sourire énigmatique, et surtout une voix très particulière unique et enchanteresse. Elle ne se décourage pas pour autant, et part pour les Etats-Unis où elle prend des cours au célèbre Actors Studio et tourne son premier film à Hollywood Pull My Daisy de Robert Franck en 1958, avec Jack Kerouac.
De retour en France, elle continue sa carrière d’actrice au théâtre où elle enchaîne les rôles et se fait vite repérer par Alain Resnais qui la dirige dans L’année dernière à Marienbad. Ce rôle lui vaut une reconnaissance immédiate du métier et du public. Popularité qui sera accentuée par son rôle dans Muriel ou le temps perdu, toujours sous la direction de Resnais. Delphine devient sa muse et incarne pour l’époque l’image d’une nouvelle femme empreinte de modernité.
En 1968, sous la direction de François Truffaut, elle tourne dans Baisers volés, film charnière dans le cycle d’Antoine Doisnel, où elle interprète le personnage troublant de Fabienne Tabard, une femme romantique, énigmatique et maîtresse de son destin, objet de désir et de fascination. Le personnage d’Antoine dira d’elle: « Ce n’est pas une femme, c’est une apparition ». Une apparition rendue inoubliable grâce à Resnais et Truffaut.
Cependant, Delphine tournera également avec les plus grands de son époque, français ou étrangers. Delphine peut tout jouer : elle se transforme en fée extravagante pour Jacques Demy dans Peau d’âne (1970), se pare des habits de l’envoûtante comtesse Bathory dans Les lèvres rouges (1971) d’Harry Kümel et se fait tour à tour prostituée et grande bourgeoise pour Luis Buñuel dans La Voie lactée (1969) et Le Charme discret de la bourgeoisie (1972). Elle tourne également pour les cinéastes William Klein (Qui êtes-vous Polly Magoo?, 1966, Mr Freedom, 1969) et Joseph Losey (Accident, 1966, Maison de poupée, 1973). (….)
Elle joue également avec Sami Frey, son compagnon, dans le film ovni Le Journal d’un suicidé de Stanislav Stanojevic, sélectionné à Cannes et à Venise en 1972.
Outre ses talents d’actrice, Delphine se tourne rapidement vers une cause qui lui tient à cœur: le féminisme et le militantisme. Pour cela, elle collabore avec des femmes dont la vision et la démarche lui corresponde. Elle collabore notamment avec Marguerite Duras pour quatre films: La Musica, 1967, India Song, 1975, Son nom de Venise dans Calcutta désert, 1976, et Baxter, Vera Baxter, 1977. Femme de conviction, elle signe au côté de Simone de Beauvoir, Romy Schneider, Jeanne Moreau et bien d’autres le Manifeste des 343 salopes publié en avril 1971 par le Nouvel Observateur et participe à la Marche des Femmes un mois plus tard.
C’est tout naturellement que Delphine passe à la réalisation, voulant exprimer elle-même tout son anticonformisme et son combat pour l’égalité. Elle réalise ainsi deux films militants et dérangeants: Maso et Miso vont en bateau en 1975, et SCUM Manifesto l’année suivante. De 1976 à 1981, l’actrice travaille sur la réalisation d’un documentaire, Sois belle et tais-toi, compilation d’une vingtaine d’entretiens qu’elle a mené avec des actrices françaises, anglaises et américaines (Shirley McLaine, Jane Fonda…) qui s’expriment sur leur place au cinéma, et surtout sur celle que l’on veut bien leur donner. En 1982, elle fonde avec d’autres amies féministes le Centre audiovisuel Simone de Beauvoir, consacré au souvenir de la lutte des femmes.
L’actrice meurt le 15 octobre 1990 des suites d’un cancer du poumon et laisse un grand vide au sein de la famille du cinéma. Elle nous laisse surtout l’image d’une femme moderne et combattante, celle d’une belle qui ne se tait pas…
A lire:
François Poirié, Comme une apparition : Delphine Seyrig, portrait, Arles, Actes Sud, coll.
« Domaine français », 28 février 2007
A voir:
Tout sur Delphine:
http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne-140/videos/
Extrait de Sois belle et tais toi:
http://www.dailymotion.com/video/xb14ub_sois-belle-et-tais-toi-extrait-de-d_news
Hommage à Delphine Seyrig:
http://www.dailymotion.com/video/xc4hmg_delphine-seyrig_shortfilms#.UTeUbKDAPiQ
Delphine Seyrig dan Baisers volés, extrait:
http://www.youtube.com/watch?v=7LgHlIora-U
1 Comment
laurence
16 mars 2013 at 13:53bravo et merci pour ces deux portraits de femme, j’ai adoré Delphine, que l’on méconnait malheureusement, j’ai aimé Colette la sportive !