Auteur de plusieurs romans, Harold Cobert s’est plongé dans l’effroyable et retentissante affaire Fourniret en s’interrogeant sur le rôle joué par Monique Olivier, compagne et épouse de Michel Fourniret, violeur et meurtrier en série, surnommé « l’ogre des ardennes », et nous livre un récit époustouflant. A lire absolument !
Rappel des faits :
Monique Olivier, alors garde-malade, rencontre Michel Fourniret, en prison pour agressions sexuelles, par le biais d’une annonce parue sur le Pèlerin Magazine. Après un échange de lettres, dans lequel elle va se livrer naïvement, elle accepte le pacte fondateur de Michel Fourniret, qui lui promet de tuer les hommes qui l’ont humilié et en échange elle lui fournira des vierges. Elle vient le visiter en prison, et à sa sortie, ils se marient. Leur parcours sordide démarre en décembre 1987 lorsque Michel Fourniret viole et tue sa première victime, c’est le début d’une plongée dans l’horreur qui va durer 17 ans, émaillée de viols et de crimes horribles sur des jeunes filles.
Michel Founiret, connu pour ses agressions sexuelles, est obsédé par la virginité. Un jeu pervers démarre alors entre eux, scellant ainsi un « pacte criminel » : Monique Olivier lui fournit des jeunes filles vierges, nommées « MSP » : membranes sur pattes, et devient ainsi rabatteuse pour satisfaire ses pulsions, qui le conduiront à violer et tuer ces jeunes filles.
Mais en juin 2003, Michel Fourniret est arrêté sur dénonciation. Sa femme garde le secret durant un an, craignant sans doute la sortie de son mari, elle va finalement craquer au 120ème interrogatoire, livrant avec des détails scabreux leur parcours odieux.
Monique Olivier se présente comme une victime, dominée par un mari diabolique, l’enquête et le procès montreront une réalité bien différente.
Le 28 mai 2008, Michel Fourniret est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible pour 5 meurtres et 2 assassinats soit 30 ans fermes. Monique Olivier, complice, et jugée en même temps, est condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité mais assortie d’une période de sûreté de 28 ans.
Harold Cobert a découvert l’affaire Fourniret en 2008 en suivant le procès à Charleville Mezières. Il a été sidéré par Monique Fourniret, se demandant comment une femme pouvait être à la fois complice d’une telle horreur et être mère, se mettant en scène, enceinte puis avec son enfant, en aidant et en stimulant ainsi Michel Fourniret durant des années dans un parcours criminel.
Ce roman sorti en août 2016 plonge au cœur d’un couple diabolique, dans lequel l’auteur se met dans la tête de Monique Olivier, surnommée « la mésange » par Michel Fourniret, et dans lequel il montre habilement la dualité fragile et cruelle de Monique Olivier qui fut une véritable ogresse.
Harold Cobert va se livrer à un travail minutieux et conséquent en lisant tous les articles de presse, documents, lettres, analyses et ouvrages sur l’affaire. Il va rencontrer le commissaire qui a auditionné Monique Olivier, et qui lui confiera son dossier.
Harold Cobert décide de se mettre à l’écriture de ce roman en décidant d’alterner les points de vue de Monique Olivier et ceux de Jacques Debiennes, policier chargé de l’enquête.
Le roman démarre le 26 juin 2003 lorsque Michel Fourniret se fait arrêter suite à l’enlèvement raté d’une jeune fille qui réussit à lui échapper et le dénonce. L’histoire se déroule entre le 26 juin 2003, jour de l’arrestation de Michel Fourniret et le 22 juin 2004, lorsque après un an d’enquête, à raison de 120 auditions, soit 3 à 4 auditions par semaine, Monique Olivier craque le jour du verdict du procès Dutroux, dans une Belgique meurtrie par la thématique de la pédophilie, et révèle leur terrible parcours criminel.
Ecriture et roman :
Empruntant la forme du roman policier et du roman noir, Harold Cobert laisse deux voix s’exprimer, celle de Monique Fourniret, et celle de Jacques Debiennes.
L’auteur alterne les chapitres en se mettant dans la tête de Monique Olivier, qu’il n’excuse pas, mais dont il tente de comprendre la dualité, en se fondant sur les faits et la ressentir. Monique Olivier qui se dit victime d’un mari tyrannique, devient complice consentante, active puis inspiratrice. Les rapports pervers qu’elle a avec lui, et auprès duquel elle se soumet en apparence, mais qu’en fait elle domine en maîtrisant ses fantasmes déviants, font d’elle une complice diabolique à la personnalité troublante, et machiavélique ? qui sert de catalyseur à son monstre de mari, n’hésitant pas à se servir de son enfant pour attirer les jeunes filles.
Harold Cobert a su, avec habileté, ne pas tomber dans l’obscénité et le sordide, en retraçant les circonstances de ces faits tragiques, s’inspirant d’un faits divers réel. Avec délicatesse, l’auteur a su au travers de ses mots, aborder un sujet difficile, dont il a su faire passer les émotions et donne un roman percutant et dense, tout en gardant une cohérence du début jusqu’à la fin.
Il a su apporter une dimension humaine en s’interrogeant sur ce qu’est la violence, le crime, la démence, comment fonctionnent ces criminels, mais également comment les policiers vivent-ils et dans quelle mesure leur travail impacte leur vie privée. Il a su reconstruire les auditions de Monique Olivier, qui est libre, et entendue comme simple témoin. On assiste à un affrontement face à une femme manipulatrice, passive, au langage glacé, dont le QI est de 131, mais dont le commissaire qui l’interroge inlassablement est persuadé qu’elle joue un rôle et il cherche à la piéger. On suit le quotidien du commissaire, très humain, consciencieux, bon vivant, très tenace et dont l’affaire Fourniret sera l’affaire de toute une vie.
Dans ce roman passionnant où l’écriture est prenante, l’auteur rend hommage à l’enquête menée, délivrant un roman réussi, écrit avec ses tripes, ça se sent dans le rythme au fil des pages. Le lecteur est pris d’emblée par la profondeur de l’écriture de l’auteur qui a su placer des mots justes où il faut, on en ressort bluffé et bouleversé par la qualité de ce récit qui nous interroge sur la noirceur de l’être humain, qui peut basculer dans la folie et l’horreur.
Ce roman se lit comme un thriller, extrêmement bien écrit et documenté, au style vif, une écriture ciselée, sans tomber dans le glauque et le voyeurisme, Harold Cobert a su au travers de son écriture habile, dense, précise, et dynamique, emporter le lecteur qui découvre un livre fascinant, et bouleversant. Harold Cobert étonne brillamment à chaque roman car il a le talent incroyable d’emporter son lecteur et on ressort abasourdi par la profondeur et la qualité d’écriture indéniable de l’écrivain.
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