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Le fantôme de Baker Street : un bel hommage au charme surnaturel de la littérature victorienne

A l’approche d’Halloween, voici un livre fascinant qui offre un hommage aux monstres sacrés de la littérature londonienne. A savourer d’effroi !

Bourland

Le fantôme de Baker Street est l’une des aventures fictives des détectives Andrew Singleton et James Trelawney dans la collection « Détectives de l’Etrange » écrite par Fabrice Bourland. Cet écrivain, né en 1968, a consacré sa vie dans le milieu littéraire : il a été rédacteur en chef d’un magazine consacré à l’actualité de la nouvelle, puis il a dirigé plusieurs collections de livres divers. Admirateur d’Edgar Allan Poe, de Robert-Louis Stevenson et d’autres auteurs victoriens connus, la création des « Détectives de l’Etrange » lui permet de ressusciter une période envoûtante de la littérature britannique au XIXe siècle.

Fabrice-Bourland

Tout d’abord, qui sont ces Détectives de l’Etrange ? Ce sont Andrew Singleton et James Trelawney, deux inspecteurs qui sont en réalité des admirateurs dévoués de Sherlock Holmes. Et quoi de plus évident comme première enquête que de percer le mystère d’un fantôme de Holmes hantant tous les soirs son créateur, sir Arthur Conan Doyle en personne ! L’idée est séduisante : faire intervenir des fans du plus grand détective pour arrêter son hypothétique spectre procure une sensation de plaisir chez le lecteur « Doylien ». Pour le lecteur non averti de Sherlock Holmes, cette idée lui permet d’observer une nouvelle facette intéressante du personnage mythique.

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Il faut savoir que sir Conan Doyle avait créé ce héros pragmatique comme un modèle de personnalité pour lui-même. L’ironie du sort est que l’écrivain jalousait fortement sa création, beaucoup plus célèbre aux yeux des lecteurs, au point de vouloir l’éliminer dans ses propres aventures. Cet aspect de la personnalité de sir Conan Doyle est traité de manière très intéressante dans le récit écrit par Bourland. L’auteur s’interroge sur la relation entre l’écrivain et sa création en même temps que sur l’aspect fictif de Holmes lui-même.

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C’est dans le questionnement de l’imaginaire et du réel que Fabrice Bourland touche à la caractéristique majeure de la littérature victorienne fantastique. Les auteurs emblématiques de cette période littéraire, tels que Robert-Louis Stevenson, Mary Shelley ou Oscar Wilde par exemple, étaient fascinés par la pratique du spiritisme et par les légendes urbaines, donnant un effet attractif fascinant dans leur quotidien. Ils s’en sont servis pour donner naissance à des créatures impressionnantes et fictives qui font intrusion dans la réalité, dans le but de remettre en cause des conceptions rationnelles de notre monde. Pour exemple, L’Etrange cas du docteur Jekyll et de Mr. Hyde (1886) et Frankenstein (1818) questionnent tous les deux notre rapport d’humanité avec la science. Le docteur Jekyll réussit à prouver que notre personnalité dissimule des vices cachés et le docteur Frankenstein se prend pour Dieu en réanimant un tissu d’organes humains. Triomphant de leurs réussites scientifiques, les deux scientifiques en perdent finalement leur humanité. Dans le récit de Bourland, il y est question de nos limites créatrices : quelle légitimité l’écrivain a-t-il de vouloir inventer des personnages imaginaires ? Quelle est la part de réel et la part de fiction de sa création ? Peut-elle vivre indépendamment de la volonté de son inventeur ? Amoureux de ces histoires surnaturelles envoûtantes, Bourland décrit soigneusement l’ambiance funèbre des lieux, ménage à merveille ses effets de suspense dans l’enquête et offre un festival de montres qui ont fait la renommée de cette littérature fantastique.

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Fabrice Bourland, semble-t-il fasciné aussi par l’attrait mythique de Sherlock Holmes, trouve une idée formidablement originale pour son duo d’inspecteurs. Le lecteur se retrouve en présence de deux admirateurs pittoresques de Holmes qui s’improvisent en détectives privés, alors que leurs techniques d’investigation sont entièrement fondées sur celles établies par leur idole de papier. L’auteur va jusqu’à inverser un temps les personnalités de son duo similaire au premier abord à leurs modèles, Holmes et Watson. En effet, Singleton apparaît d’abord comme le héros ferme et juste, puis finit par se faire piéger par ses sentiments au fil de l’enquête. Trelawney gagne ainsi en confiance et en agilité d’esprit, à l’inverse de son partenaire dépassé par les évènements. Mais bien au-delà de la simple idée cocasse d’inversion des rôles, Bourland choisit un couple de fans « doyliens » comme les inspecteurs de l’histoire afin d’approfondir sa réflexion sur la part de réel des personnages créés sur papier. Ce sont précisément l’admiration de nombreux lecteurs pour une œuvre ou un personnage fictionnels qui donne en partie à ces créations son aura intemporelle au fil des siècles. L’auteur illustre cette idée par une image poétique qui renforce l’importance du lecteur pour l’écrivain

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     Finement écrit, Le fantôme de Baker Street est une nouvelle policière efficace et fascinante dans sa conclusion. Mise en abyme du pouvoir de la lecture, cette histoire attachante se veut être avant tout une déclaration d’amour à tout un pan de la littérature gothique et fantastique du XIXe siècle et de ses monstres sacrés.

 

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1 Comment

  • Reply
    Méloë
    30 octobre 2013 at 17:51

    Ce livre me tentait depuis longtemps, mais à cause de toi j’ai fini par craquer : après avoir lu ton billet pendant le déjeuner, j’ai filé me chercher le bouquin !

    Merci pour ton article détaillé !

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