Musicalement vôtre

Galiléo !

Que celui qui n’a pas un jour hurlé « Galiléo » en imitant en essayant d’imiter la voix de fausset de Roger Taylor me jette la première pierre !

Comme d’autres millions d’utilisateurs de Google, vous avez sans doute appris qu’hier c’était l’anniversaire de Freddie Mercury. Le saint homme aurait dû fêter ses 65 ans sonnants et trébuchants.

Plutôt que de rendre hommage à Freddie Mercury uniquement, j’ai décidé aujourd’hui de mettre en valeur la géniale créativité avant-gardiste du groupe tout entier grâce à un monument emblématique de la musique, indéfectiblement associé au chiffre un et aux superlatifs : premier clip, premier morceau d’opéra rock, titre le plus cher à produire de l’histoire et l’un des plus élaborés techniquement, resté premier au classement pendant neuf semaines d’affilées dans un nombre incalculable de pays… j’ai nommé Bohemian Rhapsody de Queen :

Fin des années 1960, Farookh Bulsara (déjà surnommé Freddie Mercury), Roger Taylor, Brian May et John Deacon forment Queen. Leur rock théâtral mi-hard, mi-doux, ponctué d’envolées lyriques peine à séduire. Et puis très vite, leur quatrième opus A night at the opera sorti en 1975 et Bohemian Rhapsody notamment, apportent une renommée mondiale méritée aux sujets de sa gracieuse majesté.

Bohemian Rhapsody, c’est la rencontre improbable du rock et de l’opéra baroque, combinés aux expériences instrumentales et extravagances vocales de Freddie Mercury et de Roger Taylor !

Selon les autres membres du groupe, Freddie Mercury avait la chanson définitive en tête dès le début. « The Fred’s thing », telle qu’on la surnommait au départ, a été entièrement écrite, composée et enregistrée sous sa direction en six semaines, au terme de trois semaines de répétition. A titre de comparaison, en 1975, trois semaines suffisaient à enregistrer un album entier… Il s’agit d’un travail titanesque, l’intégralité des parties vocales et instrumentales ayant été enregistrées une à une. Les bandes sons initialement opaques sont devenues transparentes au fil des sessions à force de passer sur les têtes d’enregistrement ! La partie opéra à elle seule, a nécessité 180 prises de sons qui ont été ensuite découpées au rasoir et assemblées dans le bon ordre à l’aide de ruban adhésif. Bohemian Rhapsody reste à ce jour l’un des morceaux les plus travaillés de l’histoire de l’industrie du disque.

La chanson repose sur une structure assez inhabituelle, elle est scindée en six parties : une introduction, une ballade au piano, un solo de guitare de Brian May, une partie opéra, une partie hard-rock et un outro. Elle narre l’histoire d’un homme qui vient de tuer un autre homme et qui vient par là-même de détruire sa propre vie. Le narrateur s’adresse à sa mère et l’incite à tenir le coup. Il se dit fatigué et veut prendre congé du monde, il regrette d’avoir à mourir et souhaite même n’être jamais né. La section opéra du morceau décrit alors la descente aux enfers du personnage, où des factions rivales se disputent son âme. Enfin les riffs lourds et électrisants laissent la place à une douce mélancolie où le narrateur admet que l’on ne peut échapper à la réalité : « Anyway the wind blows ».

Beaucoup se perdent en conjectures quant à la signification réelle des paroles, Mercury les qualifiait pour sa part de « pur non sens qui rime » et déclarait à ce propos : « Je crois que les gens devraient simplement l’écouter, y penser, puis se faire leur propre idée sur ce que ça leur raconte. »

Lors de sa sortie commerciale, Bohemian Rhapsody est accompagnée d’un clip audacieux, souvent désigné comme la toute première vidéo promotionnelle ayant contribué à fixer les bases des clips à venir. En réalité, les Beatles avaient déjà apporté leur (petit) grain de folie dans l’univers tâtonnant du clip avec Strawberry fields forever dès 1967 :

Cependant il est vrai que le succès phénoménal du titre et de la vidéo a grandement favorisé l’avènement du clip, permettant aux artistes de choisir l’accompagnement visuel de leurs chansons et de ne plus se déplacer aux quatre coins du globe pour faire leur promotion.

Bohemian Rhapsody a tellement été travaillé et retravaillé en studio, les voix se sont tellement complexifiées, qu’il est presque impossible de jouer ce morceau en live. En concert, le groupe diffusait des enregistrements playback du morceau pour l’introduction a cappella et pour la section opéra. Seul Demon Kogure, chanteur du groupe japonais Seikima-II, à ce jour (et à ma connaissance !) a réussi l’exploit d’interpréter ce morceau en intégralité sur un plateau de télévision en 2007, sans l’aide de bandes. Il avait dépouillé un flamant rose et s’était grimé en redoutable et effrayant (ou pas) Lord of Darkness pour l’occasion, s’était entouré d’une cantatrice soprano pseudo bavaroise, d’un pianiste aux airs de Polnareff version nippon, d’un chœur de vingt jeunes filles virginales et de pingouins, et avait confié le solo de guitare à un guitariste tout droit sorti des années 1980 et à un saxophoniste chevelu. Le résultat perd en mélancolie et en sincérité, la prononciation anglaise est approximative et l’accent japonais est à trancher au couteau, mais la performance est indéniable. Ceci est une version karaoké, faites donc plaisir à vos voisins :

En guise de bonus tracks, je vous propose un retour dans le temps, direction l’année 1996 et cette reprise groovy par The Braids. Quoi qu’on en pense, l’ensemble fait preuve d’originalité et ne se contente pas d’une bien souvent piètre imitation de l’original :

Nombreuses sont les reprises de Bohemian Rhapsody, mais rares sont les réinterprétations de qualité, comme si le morceau se suffisait à lui-même. Rien à enlever, rien à rajouter ! Mesdames et messieurs nous sommes face à un chef d’œuvre qui a ouvert les portes du Panthéon des Grands Groupes de Rock au royal quatuor britannique. Mike Myers ne s’y est pas trompé…

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1 Comment

  • Reply
    Nelly
    6 septembre 2011 at 16:39

    Merci pour cet article très instructif, je ne pensais pas que la réalisation de ce tube légendaire avait été si complexe ! (Et merci pour le clin d’oeil aux Beatles !)

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