« Je regrette que le temps d’aimer soit si court »
Christian Lehmann est un médecin généraliste, mais également écrivain. Cet auteur a écrit plus d’une quinzaine d’ouvrages, livres pour enfants, adolescents et adultes. Ce passionné d’informatique écrit des romans qui se distinguent de par leur originalité dans le style et les thèmes abordés. La médecine, la lutte entre le bien et le mal, le fantastique, la responsabilité des individus par rapport au conformisme de la société sont les thèmes qui irriguent son oeuvre et dans lesquels le lecteur est conduit à se poser des questions morales fondamentales. Christian Lehmann est également un homme engagé, comme il le démontre dans ses livres, mais aussi dans ses combats. Ce médecin généraliste-écrivain, a également un blog fort intéressant « H5N1 » : http://enattendantH5N1.blog.20minutes.fr
Biographie :
Christian Lehmann est né le 15 août 1958 à Paris. En 1968, il rentre en 6ème au Lycée international de Sèvres, lycée ouvert sur le monde et les expérimentations pédagogiques. Enfant, Christian Lehmann découvre le plaisir de la lecture et passionné il lui arrive de voler des livres dans les librairies. En 1970, il découvre l’Angleterre et la ville balnéaires de Brighton, mais surtout la science-fiction et la littérature anglo-saxonne. Il démarre sa première année d’études médicales en 1975, et entre 1982 et 1986, il travaille jour et nuit dans un service de réanimation cardiaque qu’il compare à « son VietNam à lui ». Il obtient son diplôme de docteur en médecine en 1984 et publie son premier ouvrage au titre accrocheur « Détermination de la posologie minimale efficace de la propafénone dans les arythmies ventriculaires par la méthode de Holter ». En 1985, il s’installe dans un cabinet de médecine générale où il a du mal à s’adapter après ses années passées en réanimation cardiaque ; cette année-là, en juillet, il y a l’affaire du Rainbow Warior qui le marquera. En 1986, il lance avec des amis un magazine « Chroniques d’Outre-Monde » consacré au jeu de rôle et à la littérature fantastique dont 14 numéros seront publiés, puis il collabore à une agence de comunication en tant que rédacteur médical. Cette même année, Dulcie September, porte parole de l’ANC de Nelson Mandela est assassiné à Paris par les services secrets. En 1988, il publie « la Folie Kennaway » et début une collaboration avec Jean-Michel Ulmann, durant quinze ans, comme rédacteur chef des pages culture de l’hebdomadaire « Impact Médecin ». Puis Christian Lehmann publiera tour à tour des livres pour enfants, adolescents et adultes et continue aujourd’hui son engagement dans l’écriture de son blog notamment.
Les débuts du parcours dans l’écriture :
Alors qu’il est étudiant en médecine, Christian Lehmann écrit un texte inédit et jamais publié « les satins innocents » , il décide d’envoyer ce manuscrit aux maisons d’éditions sans succès. Cet échec lui permet alors de renforcer son écriture et de produire des nouvelles jamais publiées mais qui lui ont permis d’approfondir son écriture. Et c’est ainsi que « la Folie Kennaway » voit le jour après un long travail de réécriture en 1988. Dans ses romans pour adolescents, Christian Lehmann, au travers d’intrigues passionnantes, aborde la question essentielle du vrai et du faux et amène ainsi son lecteur à se former un jugement en lui apprenant à penser librement. Christian Lehmann évoque l’importance de la lecture pour les écoliers, collégiens et lycéens car le goùt de la leccture correspond au goût de la liberté. les livres de Christian Lehmann se constituent autour de ses personnages au travers desquels l’auteur par son observation du monde, des hommes et de la nature humaine mais également au travers de ses rencontres et lectures provoque chez le lecteur la possibilité d’une réflexion et se poser des questions autour des thèmes abordés.
Pour Christian Lehmann, les livres lui ont servi à façonner sa vision du monde, car il dit « J’étais persuadé, et je le suis resté, que les livres sont des clefs que nous fourguent en contrebande les écrivains, les clés de de notre accomplissement personnel ».
Livres pour enfants, parus à l’Ecole des Loisirs, collection Mouche :
« Pomme et le magasin des petites filles pas sages » paraît en 1994, illustrations Mette Yvers : C’est le premier livre pour enfants de l’auteur qui raconte l’histoire de Pomme, une petite fille pas sage, dont le papa, excédé, menace de la ramener au magasin des petites filles pas sages.. Mais Pomme, pas impressionnée, est ravie d’apprendre l’existence d’un tel magasin.
« Taxi et le Bunyip » paraît en 1995, illustrations d’Anaïs Vaugelade, et raconte l’histoire d’un bébé kangourou, dont la maman kangourou tombée dans le piège d’un chasseur, l’oblige à sortir de la poche protectrice et partir à la recherche d’un animal plus fort et capable de l’aider. Le petit kangourou pourra-t-il rencontrer l’animal, créature monstrueuse et pire cauchemar des hommes ? Le Bunyip est un animal mythique d’Australie, ressemblant à nos dragons ou loup-garous… Dans ce roman, l’auteur a voulu montrer le pouvoir de l’innoncence et de la naïveté.
« Le Crocodile de la Bonde » parait en 1996, illustrations Deiss, et raconte l’histoire d’une petite fille, Prune, qui adore prendre des bains toute seule en imaginant des histoires, mais un jour, elle doit partager sa baignoire avec son petit frère Thomas… et ça ne lui plait pas du tout. Pour récupérer sa baignoire, Prune a une idée excellente mais dangereuse.. C’est grâce aux disputes de ses enfants dans leur baignoire que l’auteur a eut l’idée de cette histoire et à une vieille rumeur qui racontait qu’en Amérique les gens se débarassaient volontiers dans les toilettes, de bébés crocodiles domestiques lorsqu’ils devenaient trop gros…
« Le Père Noël n’existe même pas » paraît en 1996, et évoque l’histoire de Nils, le lutin, qui fait partie des meilleurs employés du Père Noël, mais qui n’aime ni les enfants, ni les jouets et qui a un mauvais caractère Or, il décrouvre qu’une commande est restée coincée dans la boite aux lettres et le Père Noël étant déjà parti, Nils va être obligé d’assurer lui-même la livraison.
Livres pour adolescents, parus à l’Ecole des Loisirs, collection Medium :
« No Pasaran, le jeu » parait en 1996 et s’avère un succès de librairie, dépassant les 250 000 exemplaires, ce livre reçoit de nombreux prix et distinctions, notamment le Prix Lecture Jeune en 1997. Publié dans le monde entier, il est également étudié en France et à l’étranger dans les collèges et lycées.
Dans une boutique de Londres, un vieil homme remet à trois collégiens, Thierry, Eric et Andreas un jeu vidéo « l’Expérience Ultime ». Les jeunes collégiens se retrouvent piégés dans le jeu qui les entrainent dans une descente aux enfers de la guerre. Thierry et Eric sortent vivants du jeu, mais Andreas reste bloqué dans la rafle du Vel d’Hiv de 1942. Dans ce roman, Christian Lehmann met en scène des adolescents passionnés de jeux vidéso qui se retrouvent piégés dans un jeu sophistiqué et deviennent des acteurs de la seconde guerre mondiale. L’auteur a su habilement croiser guerre virtuelle et guerre réelle, le virtuel bascule dans le réel et les collégiens se retrouvent ainsi à Verdun, Guernica ou Stalingrad, vivant les horreurs des guerres. Ce récit cru et oppressant transforme le rêve d’immersion totale dans un univers virtuel en un véritable cauchemar et donne une impitoyable leçon d’histoire et de vie.
« la Citadelle des Cauchemars » parait en 1988. Vincent, le narrateur souffre d’insomnies et de cauchemars depuis la mort de son grand-père. Hanté par un rêve qui le poursuit, Vincent parviendra à s’en détacher au travers de l’écriture, en acceptant la mission qui lui est confiée. Dans ce roman domine une ambiance de conte et de merveilleux, un récit fantastique pour adolescent avec un héros exigeant et droit, modèle moral pour qui tout n’est pas facile car il vit l’écriture comme une tâche ardue. C’est aussi une réflexion sur la littérature quant elle est utilisée à des fins mercantiles.
« La Nature du Mal » paraît en 1998. Stéphane Andrieu, jeune cinéaste ambitieux, après avoir eu un échec de son premier film quitte la France pour un reportage sur les droits de l’homme au San Felicio. En arrivant dans cette île des caraïbes, Stéphane entre en contact avec le colonel de La Penà, réputé pour sa violence, sa cruauté et ses accès de folie, qui règne en maître absolu de Castel Morro, lieu où l’on interne et torture des opposants politiques. Dénoncé par Amnesty International comme responsable de la terreur instaurée après le triomphe de la révolution, le colonel se dévoile peu à peu dans une confession sincère et émouvante, dont Stéphane, jeune arriviste, préoccupé par sa réussite médiatique ne tiendra pas compte. Au travers de ce roman, l’auteur dénonce l’hypocrisie en apprenant au lecteur à remettre en question les propos du narrateur, en abordant des thèmes difficiles comme la torture et l’asservissement de l’homme par l’homme sans complaisance et avec compasssion.
« Tant pis pour le sud » sort en 2000. Céline déteste le sud de la France où ses parents l’obligent à passer ses vacances chez ses cousins. Mais lorsque Julien son cousin se suicide, Céline décide de retourner dans le sud pour en savoir davantage. Son oncle Bernard pense que les jeux de rôle sont responsables du suicide de Julien, mais Céline veut en avoir le coeur net. C’est un roman d’action engagé dans lequel on suit l’itinéraire d’une jeune fille en devenir qui va se trouver confrontée aux non-dits et aux mensonges.
« Andreas, le retour » paraît en 2005, c’est la suite de « No Pasaran, le jeu ». Trois ans plus tard, Thierre et Eric en regardant une émission de télé sur les dangers des jeux virtuels reconnaissent leur ami Andreas perdu dans le jeu, « l’Expérience Ultime ». Ils décident de sauver Andreas avec l’aide de leur ami Khaled.
Livres pour adultes :
« La Folie Kennaway » parait en 1988 aux Presses de la Renaissance et s’avère un grand succès populaire. Francis Kennaway, écrivain renommé, vit ses derniers instants dans un hôpital de Londres. Se sachant condamné, il confie un lourd secret au médecin qui le soigne le Dr Sylvia Fuchs. Suspecté d’avoir assassiné son amant Henry, peintre, Francis Kennaway a simulé la folie pour échapper à la justice.
« La Tribu » parait en 1990 aux Presses de la Renaissance et sera adapté au cinéma par le réalisateur Yves Boisset en 1991. L’auteur a participé de près au film en tant que conseiller technique. Olivier Rohan est un jeune médecin dans un grand hôpital de la région parisienne. C’est au milieu de ses camarades, la joyeuse équipe surnommée « la tribu », qu’Olivier vit des amours baclées, des amitiés, mais un jour un adolescent meurt dans des conditions étranges et le jeune médecin se retrouve pris au piège de sa conscience et s’engage alors dans une course à la vérité.
« Un Monde sans Crime » parait en 1993 aux Presses de la Renaissance. Mathias Halpern, grand reporter, était à bord du Rainbow Warior lors de son explosion. Des années plus tard, Mathias, revenu de ses illusions, observe avec amertume ses confrères succomber aux tentations du pouvoir, lorsque sa fille Sarah est victime d’une tentative d’enlèvement. Rattrapé par le passé, Mathias va se trouver confronté au meurtre et à la raison d’état dans une machination infernale. Ce roman importe beaucoup à son auteur sur le plan politique car il n’était pas très facile à cette époque là d’évoquer le Rainbow Warior et les années du mitterrandisme où il n’était pas question pour les politiques de pratiquer le droit d’inventaire.
« L’Evangile selon Caïn » parait en 1995 aux éditions du Seuil. Nathan Kane, photographe renommé, est victime d’un accident d’avion en Colombie. Sebastian, son frère, décide de partir à sa recherche, avec l’aide de Gabriel Ojeda, écrivain sud-américain. Récit d’aventures, mélodrame, ce roman noir est une réflexion sur les limites de l’illusion romanesque, et à travers ce récit, c’est le désordre du monde qui vient inquiéter la fiction et la pousse dans ses derniers retranchements. L’auteur dit avoir écrit le roman le plus sombre et le plus terrible qu’il ait jamais écrit.
« Une Education Anglaise » parait en 2000 aux éditions de l’Olivier. C’est un roman sur l’enfance de l’auteur, avec une grand-mère maternelle, des diners familiaux, le narrateur qui passe ses journées plongé dans les livres, s’ouvre au monde et à ses merveilles dont le plus important sont les séjours fréquents en Angleterre. Pour l’auteur, les livres lui ont servi à façonner sa vision du monde. Dans « Une Education Anglaise », l’auteur a voulu retrouver la voie de l’adolescent qu’il était à l’époque, adolescent chétif et malingre et qui n’avait pour seule arme que les livres.
« Une Question de Confiance » paraît en 2002 chez Rivages/Noir. Laurent Scheller, médecin des médias, ancien animateur d’une émission santé publique, romancier à succès, reçoit un coup de fil de Béatrice Salvaing, épouse de Thierry Salvaing, médecin généraliste, qui a connu Laurent lorsqu’ils étaient étudiants. Accusé d’euthanasie sur une patiente, Thierry est mis en détention et son épouse demande de l’aide à Laurent.
« Patients, si vous saviez, confessions d’un médecin généraliste » paraît le 20 mars 2003, le jour où Georges W Bush envahit l’Irak. Ce livre raconte 24 heures de la vie chrono d’un médecin généraliste qui dévoile l’envers d’un monde que nous connaissons mal. C’est un cri d’amour d’un médecin pour son métier et un coup de gueule contre les prises de position des politiques, qui par le poids des charges, la lourdeur des contraintes administratives, la présence pesante des industries pharmaceutiques et le mépris affiché pour les médecins, empêchent ainsi toute humanité et information aux patients. Un livre nécessaire pour les patients.
« Les Fossoyeurs » parait en 2007 aux éditions Privé. Les fossoyeurs viennent d’une autre planète, celle où le profit est roi. En prenant forme humaine, ils nous infiltrent et nous soumettent aux lois du marché, au nom du néolibéralisme, d’un système où il faut aller plus vite, en laissant au bord du chemin les plus faibles (les malades, les personnes handicapées, les personnes âgées, tous ceux qui ralentissent la marche en avant des lendemains qui chantent pour l’actionnaire). Les fossoyeurs sont ceux qui nous expliquent que le déficit de la Sécurité Sociale est lié au laxisme des patients qui abusent et de médecins complices, désignant des fraudeurs et des parasites de l’aide sociale et ainsi amener la population à désespérer du système solidaire. En cherchant à responsabiliser par l’argent les plus démunis, les plus faibles, ils ont installé dans la population l’idée que la santé était un commerce comme un autre et que le système de la sécurité sociale était obsolète et financièrement intenable. Ils ont ainsi modifié le système de la sécurité sociale pour y appliquer des objectifs financiers masqués sous prétexte de maitrise médicalisée. Ce récit drôle et acide, dans lequel l’auteur déshabille les rouages d’un sytème prêt à nous broyer , y dénonce les petits mensonges en posant clairement la question « au nom du profit, la santé publique est elle soluble dans le néolibéralisme ? » Christian Lehmann n’a cessé de dénoncer les contre vérités d’une réforme de la sécurité sociale dont les objectifs sont de pénaliser le patient sous couvert de responsabilisation, de désespérer les généralistes et lancer la traque aux arrêts de travail et fragiliser ainsi le système solidaire en habituant chacun à payer toujours plus. Révolté par la convention médicale et le lobby des laboratoires, Christian Lehmann lance en 2004 le « Manifeste contre la réfome de la sécurité sociale », puis en 2007, avec son ami Martin Wrincker, « l’appel contre la franchise sur les soins ».
« Sarkolangue (les mots ont un sens) » paraît en 2008. Lors de sa conférence de presse en janvier 2008, Nicolas Sarkozy a dit « les mots ont un sens »… un écrivain, soucieux du langage, a du mal à croire le Président, heurté par la manière dont le nouveau pouvoir travestit les mots, falsifie les concepts et pervertit le sens des choses, Christian Lehmann prend le Président et son clan au piège de leurs propres mots, entre déclarations contradictoires, lapsus, fautes de français, raccourcis, mensonges, dénégations, reniements etc…
Christian Lehman conclut son livre « les Fossoyeurs » par cette phrase : « A ceux qui s’imaginent protégés par leur statut social, à tous ceux qui s’imaginent hors d’atteinte, à tous ceux qui rêvent sans inquiétude d’un monde où la santé serait enfin devenue un commerce comme un autre, je répondrai simplement : H5N1… Bonne chance. Vous allez en avoir besoin. » En 2005, Christian Lehmann a ouvert son blog dans lequel il écrit des billets d’humeurs, ce blog rebaptisé en 2007 « H5N1 » est un blog que je conseille vivement.
Au travers de son métier, de ses écrits excellents, de ses bouquins qui interrogent et ouvrent sur ce qui nous entoure, Christian Lehmann est un homme profondément humain et engagé, mais il a aussi réalisé son rêve d’être un écrivain pour tous.
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