En voilà de la question qu’elle est bonne ! Le 14 juillet est, comme chacune d’entre vous le sait, le jour de la fête nationale. Mais justement que fête-t-on de manière si gaillarde le 14 juillet, hormis la Sainte Camille comme me l’a rappelé ma ravissante collègue Camille ? Comme je viens de le demander à la jeune demoiselle assise en face de moi, nombre d’entre vous, lectrices de mon cœur, sont persuadées que nous commémorons la prise de la Bastille (la prison, pas l’opéra) qui eut lieu le 14 juillet 1789, où la populace, plus irritée par le prix du pain que par un éventuel sentiment anti-monarchique, s’empara par un malheureux concours de circonstances d’une forteresse médiévale où étaient détenus 7 personnes… En fait, le 14 juillet a été choisi comme date de fête nationale pour commémorer un événement qui survint un an après la prise de la Bastille, à savoir la fête de la Fédération… Vous allez me dire « qu’est ce qu’il nous raconte, le beau gosse grisonnant, là ? ». Eh oui, mesdames, par la loi du 6 juillet 1880, le 14 juillet est choisi comme date de fête nationale pour célébrer l’union de la Nation.
En effet, suite à la prise de la Bastille et au serment du jeu de paume promettant à la France de lui donner une constitution, des unités militaires de défense des citoyens, appelées gardes nationales, se formèrent dans les départements, crées en mars 1790. La Fayette, commandant des gardes nationales, eut donc l’idée d’une cérémonie célébrant l’union de ces fédérations. Elle eut lieu sur le Champ de Mars, à Paris, et des environ 60 000 délégués des fédérations vinrent à la capitale, avec leurs couleurs, un drapeau bleu-blanc-rouge, aux dispositions fantaisistes. Le roi prêta serment à la Nation devant la foule des délégués et des Parisiens réunis sous la pluie.
En 1880, on décida sur proposition du député Raspail, de retenir une date pour célébrer l’union de la Nation. En effet, en 1871, après une guerre courte, mais sanglante, la France est défaite par la Prusse et ses alliés allemands. L’Empire allemand est proclamé dans la Galerie des Glaces de Versailles, et l’Alsace et le nord de la Lorraine sont annexés par l’Allemagne. Pour venger cet affront, la IIIe République, proclamée le 4 septembre 1870, aussitôt après la défaite de Sedan, décide de créer une multitude de symboles unissant le pays, pour envisager un jour la fameuse Revanche.
Après le choix de la Marseillaise comme hymne national définitif en 1879, le choix d’un jour de « fête nationale » vient compléter le tableau. On choisit la fête de la Fédération, non seulement parce qu’elle célèbre l’union volontaire de toute la Nation, mais surtout parce que la prise de la Bastille fut un événement violent, imprévu, écrit dans le sang… Et un régime politique ne peut jaillir, sans même espérer se maintenir, de ce genre d’événements. Dorénavant, au prochain bal des pompiers, vous pourrez vous la péter pour emballer les beaux sapeurs !
5 Comments
Nadia Ogez
14 juillet 2015 at 12:35Merci Jérôme pour cette leçon d’histoire :-) et merci aussi à ma fille pour t’avoir « éclairé » ‘à sa manière) sur « l’histoire » de son prénom ;-)
nawel
20 juin 2011 at 9:40vous vous compliquer la vie
Nelly
25 novembre 2010 at 21:23C’est tout à fait ça… (Dommage d’ailleurs)
Jérôme
25 novembre 2010 at 21:16C’est plus l’idée de contestation de l’autorité qui prévaut…Le roi est sacré, sa justice est l’émanation de sa puissance divine, donc détruire un symbole de justice royal revient à toucher le roi, qui n’est donc pas si intouchable…L’homme cherche à faire saigner son dominant pour le rabaisser à son niveau et se rassurer…
Nelly
25 novembre 2010 at 21:11Merci pour cette belle leçon d’Histoire ! C’est presque dingue que l’on continue à croire que c’est la prise de la Bastille qu’on fête, alors que pas du tout. La révolution de 1789 semble avoir plus de poids dans les mémoires, que l’idée de Fédération, d’union. Enfin, ça fait bizarrement écho à ce qui anime notre société contemporaine, manifester plutôt que se rassembler…