Robe victorienne immaculée, teint blafard et inexpressif couronné de boucles brunes à peine indomptées, la jaquette du dernier album de la troublionne du rock a de furieuses allures de masque mortuaire. Bien que sorti le 25 septembre dernier, White Chalk semble évadé d’un autre temps, à des années lumières de ce à quoi P.J Harvey avait pu nous habituer jusqu’ici. Même le fan le plus inconditionnel mentirait s’il n’avouait ne pas avoir été désarçonné par la première écoute du dernier opus de l’ « excitante excitée« , comme celle-ci aime se surnommer. Une ligne de chant posée et légèrement plus aiguë qu’à l’accoutumée, avec pour seules fioritures quelques effets… Là même où l’on attendait des paroles pressées et des riffs cinglants, P.J nous prend de court et nous livre un album largement dédié au piano, instrument que par ailleurs,celle-ci n’avoue maîtriser qu’à moitié. En plus d’être le plus court de ses albums (33 minutes seulement !), White Chalk s’inscrit comme l’un des plus impressionnant tour de force qui ont marqué les 15 ans de carrière de la plus insaisissable des artistes rock.
Celle qui, en ce début des années 1990, avait créé l’événement avec son brûlot, Dry, prouvant de ce fait que le grunge-rock pouvait désormais se décliner au féminin, semble avoir rangé aux oubliettes sa folie, sa rage et sa frustration. Pour un temps, qui sait ? Pour PJ, l’heure est au luxe, au calme et à la volupté. Après avoir toujours traversé les époques et les modes avec une longueur d’avance, peut-être a-t-elle tout simplement envie de s’arrêter et de faire le point. D’où les questionnements métaphysiques sur la vie, la mort, ses petites joies et ses grands chagrins. Grande prêtresse du rock qui a su flirter entre autres avec le folk, l’électro, la pop et le hip hop, abordant tous les thèmes et styles, avec pour seul maître-mot la nouveauté, la miss Harvey est une énigme à part entière.
Lumière sur cette artiste tout sauf ordinaire!
She sells sea shells on the sea shore
Yeovil : big city dans ce Far West britannique. Pas de saloons balayés par des vents arides certes, mais pas plus d’animation aux kilomètres. Dans ce petit coin verdoyant du Sud-Est de l’Angleterre, ce sont plutôt les cochons et les moutons qui volent la vedette aux autochtones. Entre ses hameaux isolés et ses fermes désolées, c’est la contrée rurale par excellence… Presque « le trou du cul du monde » comme on aurait pu emprunter l’expression à Rimbaud et à son Charleville noyé sous les eaux. Trait d’union entre les fameuses mégalithes de Stonehenge et les hautes falaises du littoral limitrophe, ce petit coin du Sommerset est presque trop tranquille… Et pourtant, c’est le pays natal de l’illustre poète anglo-saxon T.S Eliott. Et de Polly Jean Harvey, par la même occasion.
Née le 9 octobre 1969 à Yeovil, mais élevée dans une bergerie de Corscombe, Polly a tout eu d’une enfance bohème. Des parents post hippies, qui en plus de travailler la pierre et de s’affairer dans la ferme familiale, organisaient régulièrement des concerts de rock, de blues et de jazz, lui ont indubitablement fait développer ses capacités artistiques. Comme la chanteuse l’a confié en 1995 au magazine Rolling Stone « J’ai été élevée au son de John Lee Hooker, Howlin’ Wolf, Robert Johnson et beaucoup de Jimi Hendrix et de Captain Beefheart. J’ai donc été exposée à tous ces musiciens d’exception très tôt, ça m’est toujours resté et j’ai même l’impression que, plus je vieillis, plus ça revient à la surface. Je pense que ce que nous devenons avec l’âge est le résultat de ce que nous avons connu dans notre enfance« .
Marquée par cette première rencontre avec la musique, P.J commence à s’essayer au saxophone à l’âge de 11 ans. Elle l’étudiera pendant huit ans. De formations de jazz en tournées de pub, l’ado garçon manqué touche également à la guitare qui sera sa deuxième grande découverte. Devenue grande fan de la scène indépendante US (Pixies, Television, Slint), PJ commence à écrire et intègre ses premiers groupes : Bologna, The Polekats, The Stoned Weaklings et Automatic Dlamini, en alternant instruments et chœurs vocaux. C’est d’ailleurs dans ce dernier que Polly Jean s’attirera une collaboration des plus prolifiques en la personne de John Parish, leader du dit groupe et futur orfèvre de la patte Harvey.
Comme celui-ci le confie en octobre 2001 au détour d’une interview pour les Inrockuptibles : « J’ai rencontré Polly il y a maintenant dix ans. Je me rappelle le jour avec précision, puisque c’était son anniversaire. Un ami commun m’avait invité à venir jouer avec mon groupe de l’époque, Automatic Dlamini, pour les 17 ans de cette fille que je ne connaissais pas. […] Et puis finalement, le jour venu, notre batteur qui est devenu plus tard le premier batteur de PJ Harvey est tombé malade et nous avons dû annuler le concert. Je suis donc allé seul à l’anniversaire, soulagé à l’idée de ne pas devoir être l’attraction. Et au détour d’une conversation, elle m’a avoué qu’elle écrivait des chansons. J’étais le musicien de la soirée, ça a eu pour effet de briser tout de suite la glace entre nous. Je lui ai proposé de m’envoyer des cassettes, par politesse mais aussi avec une certaine curiosité. Je me demandais quel genre de chansons une aussi frêle personne pouvait écrire. Lorsque j’ai reçu la première cassette, je n’ai pas été déçu. Comme je cherchais quelqu’un pour chanter au sein d’Automatic Dlamini, j’ai aussitôt pensé à elle. C’est ainsi qu’a démarré notre collaboration. J’ai eu la chance de la rencontrer au moment précis où s’opérait chez elle une véritable mutation, à la fois physique et artistique. Sa voix changeait, sa musique aussi, elle était en train de grandir en même temps que ses chansons. C’était très intéressant à observer : en quelques mois, Polly a transformé ses timides chansons folk de teenager en véritables brûlots, ceux-là mêmes qu’on retrouve sur « Dry » et qui l’ont rendue célèbre. Evidemment, il n’était pas question pour elle de s’éterniser au sein d’un groupe. Je l’ai encouragée à se jeter seule dans le grand bain, en sachant qu’elle pourrait toujours compter sur moi« .
You’re not rid of me
Forte de ses premières expériences musicales probantes, PJ forme son propre premier groupe, avec elle-même au chant et aux guitares, Rob Ellis à la batterie et Ian Olliver bientôt remplacé par Steve Vaughan à la basse. En ce début d’année 1991, Polly, qui s’apprête à rentrer au Central Saint Martins College of Art & Design de Londres, se demande ce qui, entre la sculpture ou la musique décidera de sa carrière… Une question qui trouvera réponse quelques mois plus tard. Au mois d’Octobre de la même année en effet, le premier titre du trio « Dress » est diffusé sur les ondes sous le label indépendant Too Pure. Sacralisé « Single de la Semaine » par le critique vedette de l’incontournable Melody Maker, John Peel, qui admire « la façon dont Polly Jean semble happée par le poids de ses propres chansons et arrangements, comme si l’air en était littéralement aspiré« […], « Dress » annonce un premier album des plus réussis.
Véritable usine à tubes, Dry sort en juin 1992. Les passions se déchaînent des deux côtés de l’Atlantique : tandis que le New Musical Express lui délivre un 9/10, Rolling Stone décerne à PJ Harvey les titres de Meilleure Auteur-Compositeur et Meilleure Artiste Féminine de l’Année. Il est vrai que, malgré son jeune âge (22 ans), la Miss Harvey possède une sacrée maturité musicale. Avec des textes travaillés mais sans concessions, sur fond de rock pur et dur qui feront sa marque de fabrique, PJ a conquis un public déjà séduit par ses portraits brossés à l’acide caustique. Avec des titres oscillant entre l’humour (« Dress » ou Sheela-Na-Gig ») et l’émotion (« Oh My Lover », « Happy and Bleeding »), Dry insuffle un vent de renouveau au rock alternatif en livrant un album de rock féminin et rageur, aux compositions simples mais novatrices. Belle récompense pour l’artiste qui, pensant que ce serait son premier et dernier album, y a mis toutes ses tripes.
A peine remis du choc de Dry, Polly Jean et son groupe malmènent à nouveau un public devenu accro à l’artiste et à son caractère bien trempé. Après avoir posé torse nu, dos à la caméra, avec une aisselle relevée laissant deviner qu’elle n’a pas vu un rasoir depuis longtemps, pour le compte encore du New Musical Express, Polly persiste et signe un deuxième album intitulé « Rid Of Me ». Car c’est sûr, celle-ci a accroché une nuée d’admirateurs qu’elle n’entend pas lâcher de sitôt. Produit par Steve Albini sur le label Island, qui s’était déjà illustré avec des groupes comme les Pixies ou les Breeders, Rid Of Me pousse encore un peu plus le filon « chanteuse à grande gueule » en faisant au maximum l’économie sur les arrangements sonores. Résultat : un disque au son sale et dur, aux paroles possédées et toujours sans concessions, résolument anti-commercial. Ce qui deviendra certainement l’album le plus brut de PJ, crache dans une rage féminine rarement atteinte des titres tels que « Rid Of Me », « Hook », « 50 ft Queenie », « Highway’ 61 », « Yuri G », « Dry », « Man Size ». Avec pour leitmotiv, le désir, la frustration et les illusions perdues, PJ n’en oublie pas pour autant une autre thématique importante dans son univers : le sexe. De manière détournée, comme dans le titre éponyme « Rid Of Me » : […] »I’ll tie your legs/ Keep you against my chest/ Oh you’re not rid of me/ Yeah you’re not rid of me/ I’ll make you lick my injuries/ I’m gonna twist your head off, see� […]. Ce qui donnerait en français : […] « Je t’attacherais les jambes/ Pour te garder contre ma poitrine/ Oh t’en as pas fini de moi/ Ouais t’en as pas fini de moi/ Je te ferai lécher mes blessures/ Je te dévisserai la tête, compris » […]. Ou de manière plus directe dans « Man-sized » ou « Dry », aux titres moins équivoques.
Néanmoins pas réellement satisfaite de la production sur Rid Of Me (ROF), qui sera le dernier album pour le trio originel, Polly Jean décide de sortir 4-Track Demos six mois plus tard. Regroupant 8 démos de ROF et 6 démos de faces B ou d’inédits, 4-Track Demos apparaît, ironie du sort, beaucoup plus clair que l’album fini. Les fans ne sont pas dupes et se ruent sur la dernière mouture. Comme Harvey l’a elle-même expliqué au détour d’une interview pour le magazine Filter en 2004 : […] « C’était comme montrer une autre facette de ce que je fais et introduire de nouvelles chansons que je n’avais pas encore enregistrées sur un disque. C’était une chose sympa à faire et je pense que c’était le meilleur moment parce que mon trio venait de se séparer et que j’étais dans une sorte d’impasse avant de décider de ce que je voulais faire de nouveau. Donc, c’était comme une sorte d’interjection avant de savoir ce que j’allais devenir » […].
1995 est l’année qui accompagnera la sortie du quatrième album de la miss Harvey, intitulé To Bring You My Love (TBYML). Produit par le trio Harvey-Parish-Flood et mis dans les bacs en février, l’album est à ce jour la plus grande réussite commerciale de l’artiste, qui fait désormais cavalière seule. Relayé par MTV qui diffuse en boucle le titre phare « Down By the Water » et par tous les médias des deux côtés de l’Atlantique, TBYML séduit les derniers résistants au phénomène PJH. Installée dans le Dorset après avoir quitté Londres, la plus scandaleuse des songwriteuses brit signe un album bluesy à souhait avec un esthétisme à la haute valeur ajoutée. Celle qui auparavant se négligeait, se prend des airs de diva excentrique en arborant lors de ses représentations strass, paillettes, boa et black wonderbra. Bienvenue dans l’univers fantasque de PJ où une mère infanticide implore la rivière de lui rendre son enfant (« Down By The Water ») et où les serial-killers ont des inspirations divines (« Working For The Man »). Avis aux détracteurs qui ont voulu la borner à un rock sale et rageur : la belle a de l’énergie à revendre en ce qui concerne son cheminement musical. Sa devise : toujours en avance, mais jamais en retard. En route pour une tournée mondiale de dix mois.
« Avec Polly, nous n’avons guère besoin de discuter pendant des heures pour savoir comment doit sonner tel ou tel titre. Nous sommes si proches l’un de l’autre depuis tant d’années que nous avons appris à laisser agir nos instincts respectifs. Nous voulions réaliser un disque qui fonctionne sur un registre émotionnel fort, notamment en ce qui concerne les parties vocales, pour lesquelles Polly s’est engagée à fond » […] (Les Inrockuptibles, octobre 2001). Premier disque à faire figurer les deux noms de John Parish et de Polly Jean Harvey sur la même pochette, Dance Hall at Louse Point (DHALP) (septembre 1996) est un album riche d’expérimentations vocales et musicales. Teinté de notes blues, rockabilly et électro, l’album n’a malheureusement pas eu le même impact que les précédents. Peut-être les auditeurs potentiels ont été quelque peu décontenancés par la présence des deux noms en couverture, toujours est-il que DHALP est le petit couac dans la discographie de la belle. Seul single promotionnel « That Was My Veil » élude d’autres titres d’aussi bonne facture tels que « Civil War Correspondent » ou « Taut ». Rien qu’à l’écoute, on se rend compte que le tournant Is This Desire? est en passe d’être franchi.
Digne successeur de To Bring You My Love, en version plus sombre, Is This Desire? débarque sur les ondes en septembre 1998. Chef d’œuvre de rock alternatif mâtiné de sons expérimentaux et électroniques, la dernière mouture de la très prolifique Polly J accuse encore un peu plus le fossé franchi depuis ses débuts. Dans son disque préféré, Polly y a mis toutes ses tripes : pas moins de 12 portraits de femmes écorchées par la vie pour répondre à la question de la nature même du désir. Entre Angelene, une prostituée à la recherche de l’homme de sa vie, Catherine, une femme introvertie et solitaire vivant dans l’isolement le plus complet et Joy, qui porte bien mal son nom, Is This Desire? se lit en même temps qu’il s’écoute. Grande performance stylistique et musicale, qui vaudra à la chanteuse l’obtention d’un Grammy Award pour la Meilleure Performance de Musique Alternative de l’Année.
Ecrit entre le Dorset et New York où PJ a posé ses bagages quelques mois, Stories from the City, Stories from the Sea annonce le grand retour de la chanteuse en octobre 2000. Considéré comme son deuxième grand succès commercial, l’album révolutionne la discographie de l’artiste jusqu’alors résolument teinté de noir et de mélancolie. Empreint d’optimisme, Stories… est une charmante découverte pour ceux qui avaient toujours été hermétiques au style de la songwriteuse. Véritable ode à la capitale américaine (« Good Fortune», « You Said Something »), on y devine que la chanteuse est ressortie grandie de cet exil yankee. Même les chansons d’amour n’ont (presque) plus leur résolution tragique (« This Mess We’re In », « This Is Love », « We Float »). En s’offrant Thom Yorke en guest sur les chœurs de « This Mess We’re In » et Rob Ellis à la production, Harvey rafle l’ensemble des suffrages en vendant près d’un million de copies à l’international, devenant de ce fait disque d’or de l’autre côté de l’Atlantique. Sous le charme, les cousins d’Amérique voient en elle la digne héritière de Patti Smith.
Quatre ans après avoir réalisé Stories…, PJ refait surface sur la scène musicale avec son très attendu Uh Uh Her. Sorti le 1er juin 2004, l’album prend tous ses fans de court par ses sonorités très blues et ses riffs de guitare si caractéristiques. Impossible de ne pas penser à Dry ou Rid Of Me. A ceci près que la post ado rebelle laisse maintenant place à une femme au ton plus posé : tantôt femme fatale en rogne contre l’amour, tantôt femme enfant qui le réclame, PJ égrène des chansons minimalistes aux rythmes entêtants. Dans cet album plus que dans les autres, celle-ci utilise sa propre voix comme un instrument. Que ce soit dans « The Life and Dead Of Mr Badmouth », « Shame », « Cat on The Wall » ou « The Desperate Kingdom of Love », on n’arrive pas vraiment à savoir, quoi de la voix ou des riffs de guitares l’emportent sur le rythme final. Un album tout en hargne et en fougue, en calme et en délicatesse.
Esprit frappeur
« Petite, j’ai voulu être vétérinaire, puis infirmière, pilote d’avion parce que je faisais beaucoup de cheval, sculptrice. Mais jamais chanteuse. Le rêve qui s’est réalisé, c’est de trouver un moyen de communiquer dans un registre artistique et d’arriver à en vivre. J’ai toujours su que je voulais communiquer, m’ouvrir à l’extérieur, mais sans savoir comment. […] Je rêve beaucoup, certaines de mes chansons viennent de mes rêves. J’écris aussi beaucoup de poésie, qui vient souvent de mes rêves, de mon inconscient. Je sais faire fonctionner mon imagination, rêver même quand je suis éveillée. Ca ne vient pas aussi facilement que quand j’étais enfant, parce que je suis accaparée par toutes les responsabilités adultes. Mais quand j’écris des textes, je passe beaucoup de temps à retrouver l’état d’esprit dans lequel j’étais enfant. Je cherche cette énergie. Mais pour moi, l’écriture est plus qu’un moyen de rester en contact avec l’enfance : c’est ma façon de communiquer avec l’extérieur. J’envoie des choses et j’en reçois en retour, heureusement ça marche dans les deux sens ».
Cette confession accordée aux Inrocks en novembre 2000 permet à PJ de récuser une autobiographie complète de ses œuvres. Les textes de la demoiselle pas si personnels que ça ? Dans ce chassé-croisé entre le rêve et la réalité, Polly s’amuse à titiller les nerfs d’un public qui, devant tant d’opiniâtreté, ne sait finalement plus où donner de la tête. Tour à tour virago, vamp, névrosée et femme-enfant, PJ multiplie les masques et les décors : non contente de sa carrière personnelle, celle-ci s’attaque également à celle des autres. Pour preuve : sa participation aux albums de Nick Cave (The Murder Ballads), de John Parish (How Animals Move) et des Queens of the Stone Age (Desert Sessions), des apparitions dans des films d’auteurs (« The Book of Life de Hal Hartley » et « A Bunny Girl’s Tale » de Sarah Miles), un album hommage à son défunt ami, John Peel, critique musical et animateur radio (The Peel Sessions 1991-2004), des expos de sculpture et des recueils de poésie parus sous son nom… La vie de Polly Jean semble plus qu’accomplie. Et pourtant, la miss ne se paye-t-elle pas le luxe de lâcher sur son dernier album « S’il te plaît, ne me critique pas, pour, pour, ce vide qu’est devenu ma vie » ! (« Broken Harp »).
Si le temps semble avoir adouci sa musique, il est moins certain qu’il en ait été de même pour le tempérament de l’artiste. Insatisfaite chronique, Polly pousse un peu plus loin les bases déjà jetées sur Uh Uh Her et livre un album mélancolique, où les remords et les regrets se disputent la première place. En héroïne romantique tout droit sortie de la littérature du XIXe siècle, le fantôme de PJ convoque les esprits à sa table. Ame solitaire luttant contre ses démons (« The Devil »), ectoplasme d’un amour réduit à son crépuscule (« Dear Darkness »), songes d’un enfant qui demande à sa mère comment grandir (« Grow Grow Grow ») ou qui tente de faire parvenir un message d’amour à sa grand-mère décédée (« To Talk To You »), les personnages qui se succèdent dans la peau de l’artiste sont d’un réalisme émotionnel tout à fait frappant. 11 chansons aériennes flottant sur 33 minutes, pas franchement gaies, mais qui au fur et à mesure des écoutes, se révèlent magnétiques. Une voix aiguë, omniprésente, révélant le spectre vocal tout à fait extraordinaire de la chanteuse, un piano tantôt timide tantôt effronté, agrémenté par ci par là d’une multitude d’instruments et d’arrangements (dont une harpe cristalline) confèrent à l’album une profondeur tout à fait poignante. Passerelle entre les dimensions et les époques, White Chalk en surprendra plus d’un. Encore un fois, le fruit des amours de Harvey, Parish et Flood promet de devenir un classique. « Ce qui a de génial avec l’apprentissage d’un nouvel instrument c’est… qu’il libère votre imagination » avouait Polly dernièrement. Il y a fort à parier qu’on n’en pas finit de trouver PJ là où l’imaginait le moins.
(Les photos proviennent du site http://www.pollyharvey.co.uk/)
Sources :
http://www.myspace.com/pjharvey
http://www.xsilence.net/artiste-132.htm
* Cahier de vacances 2010 – Article initialement publié le 5 décembre 2007
2 Comments
kino berlin
3 mars 2009 at 9:22Gut!
Mlle H
14 février 2009 at 20:20Dossier très intéressant sur une artiste que j’aime beaucoup en plus.