Né en 1974, Mathias Malzieu est connu avant tout pour être le chanteur du groupe de rock Dionysos. Pourtant, derrière l’artiste à l’énergie débordante sur scène se cache un écrivain d’une très grande sensibilité.
« 38 mini-westerns (avec des fantômes) » : le recueil de l’imaginaire
Avec ce premier recueil, Mathias Malzieu se met à l’ouvrage et présente trente-huit nouvelles allant du macabre au farfelu… Ainsi, un monde fait de chasse aux elfes, de fées-lustres, de fantômes visibles à cause de la saleté de leur drap et d’autres merveilles encore, s’ouvre devant nos yeux de lecteurs passionnés et n’a qu’un seul but : être simplement apprécié.
Ce premier livre s’avère un tantinet particulier avec ses histoires étranges. Entre l’univers de Tim Burton et l’esprit de Lewis Carrol, il offre la vision en effet d’un monde merveilleux, peuplé de créatures extraordinaires qui ont en leur possession tous les ingrédients pour l’aimer. On passe d’amusantes nouvelles (l’introduction sur le fantôme, la chasse aux elfes…) à de belles histoires pleines de cruauté (les fées-lustres). L’auteur nous montre également une réalité plus affreuse, où les hommes détruisent les merveilles de l’univers, simplement pour leur petite personne (la chasse aux elfes et la capture des fées-lustres, à cause de la cupidité).
En conclusion, « 38 mini-westerns (avec des fantômes) » est un petit bijou de lecture, riche par la construction habile de ses phrases emplies de poésie et surtout par la présence d’un univers féerique et macabre. Malgré la cruauté humaine dépeinte, cette œuvre nous fait découvrir un monde d’émotions poétiques : celui de Mathias Malzieu.
« Maintenant qu’il fait tout le temps nuit sur toi » : le deuil de l’enfance…
Pour continuer ses projets littéraires, le chanteur de Dionysos s’est penché sur un événement horrible de sa vie, toujours avec son style très personnel…
Mathias, jeune homme de trente ans, vient de perdre sa chère mère et en est bouleversé, autant que son père et sa sœur. Mais un jour, il rencontre Giant Jack, un homme incroyablement immense, docteur en « ombrologie ». Ayant la capacité rare de guérir les personnes atteintes de deuil, il donne au jeune désespéré une ombre, des livres, la possibilité de vivre pendant des années et de rêver malgré sa douleur. Cet homme extraordinaire de 4,50 mètres lui permet ainsi de grandir.
Après « 38 mini-westerns (avec des fantômes) », Mathias Malzieu revient nous faire rêver avec un roman racontant une histoire vraie : la mort de sa propre mère. Ici encore, il saupoudre ses mots d’une poésie dont lui seul détient le secret. Il explique admirablement sa douleur, et celle de ses proches, suite à cet événement triste, qui lui permet finalement tout simplement la progression vers l’âge adulte et l’abandon de l’enfance. Grâce à ce personnage de conte, il découvre un monde nouveau pour lui qui vit encore dans son monde d’enfant, malgré son âge.
« Maintenant qu’il fait tout le temps nuit sur toi » est une petite perle littéraire, qui, bien que très personnelle, allie une plume pleine de poésie et une tristesse d’une réelle beauté…
« La Mécanique du cœur » : les sentiments d’un cœur d’enfant particulier…
Pour ce troisième ouvrage, l’écrivain-chanteur se lance dans un projet très ambitieux, qu’il adaptera ensuite musicalement avec son groupe Dionysos pour l’album du même nom.
Jack naît dans la petite cité d’Edimbourg, vers l’an 1874. C’est un être tout à fait normal mais qui a un défaut étonnant : sa naissance se situant le jour le plus froid du monde, son cœur est resté gelé. Il est heureusement sauvé par une sage-femme dite folle, le docteur Madeleine, qui adore réparer les gens. Elle aide donc son petit protégé en lui remplaçant son cœur gelé par une simple petite horloge et l’élève comme son enfant, suite à la mort de la mère. Mais Jack ne connaît rien du monde extérieur, puisqu’il reste dans la demeure de Madeleine, et sa vie est difficile car les autres patients le regardent étrangement avec son horloge plantée au niveau du cœur. Ce n’est qu’à ses dix printemps qu’il peut enfin découvrir Edimbourg et ses habitants, accompagné du docteur. C’est à ce moment qu’il tombe soudainement fou amoureux d’une petite chanteuse de rue. Prise de panique, Madeleine le fait rentrer aussitôt à la maison et lui dit que n’importe quelle charge émotionnelle, principalement due à l’amour, risque de détruire son horloge et de le tuer. Mais Jack refuse de l’écouter et entame un voyage périlleux, à travers toute l’Europe, pour retrouver la petite chanteuse.
La couverture donne le ton avec un dessin présentant la petite chanteuse qui tire les engrenages de l’horloge de Jack. Avec une très belle écriture libre et personnelle, le roman s’avère être un conte de fée décalé. De par le sujet poétique et ses nombreuses aventures étonnantes, le personnage de Jack est absolument attachant car on parvient à le comprendre. Il fait penser à un Edward au cœur mécanique (ndlr : référence au Edward aux mains d’argent de Tim Burton), étant écarté du monde et reclus dans la demeure de cette femme savante et rejetée. La magie réside aussi dans la quête d’amour incroyable qu’entreprend ce personnage, malgré l’interdiction que lui a donné sa « mère » et la lourde douleur mécanique qu’il porte. La description des émotions de celui-ci est d’une féérique intensité. S’ajoutent à cela, un humour extrêmement décalé et quelquefois macabre ainsi qu’une fin complètement barrée et totalement inattendue…
« La Mécanique du cœur » est une œuvre sublime, avec son ton si lyrique par la complexité romanesque de l’histoire et par la construction magique des phrases.
* Cahier de vacances 2010 – Article initialement publié le 31 mars 2008
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