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Agnès Bihl

Pour la sortie de son quatrième album Rêve Général(e), Save My Brain reçoit pour la première fois Agnès Bihl !

Cette jeune trentenaire parisienne, issue d’une famille d’intellectuels, manie les genres comme personne ! Agnès Bihl aime dénoncer les travers de notre société et parler d’amour en même temps. La plume bien aiguisée, celle que l’on compare parfois à Renaud au féminin, use d’humour, de cynisme et tendresse pour évoquer ce qui la touche en musique.

Rencontre.

Pourriez-vous vous présenter pour les lecteurs de Save My Brain ?

Je m’appelle Agnès Bihl ! Je fais de la chanson on va dire à textes, à sens et à paroles, dans l’ère de la tradition chansonnière. J’en suis à mon 4ème album Rêve Général qui vient de sortir.

Pourriez-vous parler un peu de votre parcours ? Comment vous en êtes arrivées là aujourd’hui ?

Comment j’en suis arrivée là … ? Déjà ça a commencé par hasard et par amour, je suis tombée amoureuse d’un accordéoniste et tout de suite, je me suis mise à interpréter dans des cafés, dans le métro parisien, dans des squattes… Je me suis mise à chanter des chansons de Brassens, de Renaud, de Ferré, de Brel etc. Et puis petit à petit, j’en ai eu marre de chanter des chansons qui n’étaient pas de moi. Donc je me suis posée des questions, là-dessus, j’ai vu Allain Leprest sur scène qui est totalement méconnu du grand public, malheureusement, et d’ailleurs je ne le connaissais pas, et ça m’a fait un gros déclic, le soir même, j’ai écrit mon premier texte, ma première chanson et depuis, j’ai quitté l’accordéoniste mais j’ai pas quitté la chanson. Alors je fais mon petit bonheur de chemin, j’en suis à quatre albums, je suis généralement assez absente des médias mais voilà, je continue mon petit bonhomme de chanson en faisant des chansons et en les offrant aux gens quand je suis sur scène.

Vous avez reçu plusieurs prix, que représentent-ils pour vous ?

C’est une sacrée reconnaissance ! Une reconnaissance de la profession. C’est le genre de chose qui encourage beaucoup parce que recevoir le grand prix de l’académie Charles Cros c’est prestigieux ! Même si quand je l’ai dit à ma mère, elle m’a dit « Oui mais ça ne vaut pas une agrégation ».

Le prix Felix Leclerc m’a permit de débuter au Québec et ça commence à bien marcher pour moi.

C’est vrai que ça donne confiance ! Je passe pas beaucoup à la radio, les journaux ne parlent pas tellement de moi et de mes chansons, du coup quand il y a un prix qui tombe on se dit « Bon je suis reconnue ! ».

C’est exactement la même chose quand Aznavour, dont j’ai fait les premières parties, me dit « Continuez votre route, elle est bonne, allez y je crois en vous », c’est vachement réconfortant.

Où trouvez-vous l’inspiration pour vos chansons ?

Ce qui m’inspire pour écrire, c’est vachement variable d’un thème à l’autre. Des fois, ça part d’une idée générale, des fois d’une phrase, d’un sentiment, ce que je peux voir autour de moi, des anecdotes qui peuvent m’arriver, des confidences qu’on peut me faire, c’est très variable. C’est la vie qui m’inspire !

Entre cynisme, humour et tendresse, les sujets que vous écrivez divaguent entre défauts de l’humanité et amour de celle-ci. Êtes-vous du genre à voire le verre à moitié plein ou à moitié vide ?

Ça dépend ! De nature, je suis plutôt du genre à voir le verre à moitié plein ! Mais ça dépend ! Moi, j’aime les gens, en même temps, l’humanité n’est pas toujours très très jolie et on est souvent déçu ! C’est vrai que je prends souvent les choses avec humour. J’ai été marqué par une phrase de Boris Vian qui dit que « l’humour est politesse du désespoir ».

Vous abordez beaucoup le thème de la meilleure amie/bonne copine qui reste sur le carreau. Un rôle de composition ?

Ça dépend, y’a eu des périodes… (rires) ! Mais c’est plutôt un personnage qui me fait rire et que j’aime beaucoup jouer. Moi, j’écris beaucoup pour la scène et c’est vrai qu’il y a des personnes que l’on affectionne particulièrement et celui là en fait partie. Après je n’ai pas le complexe de la bonne copine, c’est juste que ça m’amuse !


Vous traitez des thèmes plus durs comme celui de l’inceste par exemple. Comment se déroule le processus d’écriture pour ces chansons là ?

Le processus d’écriture est exactement le même dans sa forme. C’est dans l’interprétation ! Quand je chante Touche pas à mon corps, c’est une chanson particulièrement pénible à porter et pas anodine. Je ne suis pas non plus immunisée contre le tragique de mes chansons sous prétexte que je les ai écrits, je les vis.

On peut aussi dire des choses graves en chanson. Quand on écoute une chanson, si on l’aime, elle vous appartient tout de suite, on imagine des choses qui n’appartiennent qu’a soit. C’est un genre très intime. Alors moi j’aime passer du rire aux larmes et de l’humour à l’amour. Autant j’aime faire rire les gens sur des chansons plus légères autant j’aime aussi qu’il y ait cet aspect là « gardons l’œil ouvert » sur ce qu’il peut se passer autour de nous. Finalement le plus dur ce n’est pas une chanson sur l’inceste, ce qui est horrible c’est que ça existe. Et de la chanter sur scène, je me suis rendue compte à quel point ça existait par les gens qui viennent me parler et me raconter un peu leur histoire, je ne m’attendais pas que ce soit autant. A la fin de chaque concert, il y a quelqu’un, c’est incroyable !

Dans vos albums, de nombreuses chansons évoquent le temps qui passe, la nostalgie de l’enfance… Êtes-vous une personne nostalgique ?

Bien sûr le visage de l’enfance est très présent dans mon univers mais moins dans mon dernier album, c’est surtout sur Merci Papa, Merci Maman que c’est flagrant ! Cet album, je l’ai entièrement écrit quand j’attendais ma fille et dans les premiers mois de sa naissance. Je l’ai finalement écrit entre trois échographies et deux biberons. Donc forcément, quand on attend un enfant, on s’interroge ! Moi, je me suis interrogée sur l’enfant que j’avais été, l’enfant que je découvrais…

Depuis le temps a passé, je suis plus devenue la mère de ma fille que la fille de ma mère.

Dans une interview, vous disiez avoir du mal à écrire le bonheur, pourtant, vos albums regorgent de perles de bonheur et d’optimisme (Paris au moi d’Août, SOS Bonheur…).

Sur Demandez le programme, j’avais abordé des thèmes très durs pour pleins de raisons. Déjà parce que je ne suis pas imperméable à ce que je dis et aussi en tant qu’auteur, je savais comment traiter les choses dures et glauques de notre société.

Sur Rêve Général(e), j’ai vraiment voulu avoir un point de vue positif. Je voulais savoir si j’étais capable d’écrire, avec cette rage et cette insolence que j’ai en moi, tout en étant plus optimiste ! J’ai voulu faire de la résistance positive ! Et du coup, Rêve Général(e) est beaucoup plus vivant et souriant que les autres albums.

Et aussi, je trouve que des chansons comme Merci Maman, Merci Papa ou Touche pas à mon corps ont encore plus de sens quand, de l’autre côté, j’essaie aussi de remonter le moral, et je ne me contente pas de fustiger la saloperie du monde qui nous entoure, je trouve que ça n’en a qu’encore plus de force. Et c’est vrai que dans Rêverie Général(e), même des chansons, comme Soif de Champagne, qui est une chanson d’amour peu désespérer, elle finit sur une note d’espoir. C’est encore loin l’amour, c’est le constat un peu cafardeux d’une jeune femme qui se demande si l’amour est encore loin, et en mm temps, c’est écrit avec beaucoup d’humour et une musique très gaie. Et ça se termine sur une note positive ! Et elle sait que quand elle le trouvera, elle sera une véritable emmerdeuse avec son mec ! (rires)

Finalement, tout le disque est véritablement axé une note positif. En fait, j’ai envie d’y croire, d’où le titre qui est un slogan de mai 68. L’utopie me manque un peu. J’ai un besoin urgent d’y croire !

Pouvez-nous parler de la scène ?

Je suis bien sur scène, j’ai l’impression d’être chez moi, j’ai un bonheur infini à tourner.

J’écris toujours les chansons en me disant, là il me manque une chanson drôle où là, je voudrais faire une chanson. Et j’écris véritablement en pensant déjà à l’interprétation que je vais pouvoir en donner. J’ai deux branches à mon arbre : la scène et l’écriture. Et c’est vrai que ma manière de faire de la chanson est un peu à l’ancienne. Je n’imagine pas de faire une chanson que je ne tournerais pas sur scène, et c’est toujours le contact avec les gens qui me fait aimer une chanson ou ne pas l’aimer. J’ai besoin de partager les choses avec le public.

Pouvez-vous nous conseiller des artistes ?

Il y a des gens que j’affectionne plus particulièrement, par exemple, je suis totalement fan d’Yves Jamait, et je pourrais passer des heures en encensant tout ce qu’il fait ! Il y a aussi Alexis HK que j’aime infiniment. Loïc Lantoine ou Humbert Humbert. La rue Kétanou est un vrai régal. Et j’en oublie plein !

Mais finalement, pour être touché par un artiste, c’est un concours de tellement de choses.

Agnès Bihl, c’est un personnage – blond – au caractère confirmé qui avoue avec franchise et sincérité ses interrogations sur la vie, ses coups de gueule contre le monde et ses coups de cœur de l’humanité. C’est aussi une amoureuse transie, non dénuée d’humour, qui pointe avec ironie les défauts des hommes et des femmes. C’est un sacré talent que possède cet artiste, celui de réussir à parler de tout, de jongler entre les thèmes et genres avec une aisance déconcertante. Et puis, il y a ce talent ! Ce talent du mot. Dégoter la bonne verve, la bonne phrase, la bonne rime ! Rien n’est jamais évident dans les chansons d’Agnès Bihl, tout est travaillé, juste, honnête. Une chanteuse à découvrir et à aimer, sans modération !

Site officiel : http://www.agnes-bihl.com/

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