Extravagances

Chanel Paris-Shanghai

C’est vendredi qu’a eu lieu le défilé Chanel dévoilant la nouvelle collection Métiers d’Art signée Lagerfeld. Un événement annuel, prenant en compte à chaque fois les inspirations du pays dans lequel elle est présentée. Cette fois, tout cela prend une allure un peu particulière puisque la destination choisie est Shanghai. A la fois sentimental et économique.

Sentimental tout d’abord, puisque Coco Chanel était une amatrice de culture chinoise. Economique ensuite et surtout, puisque Chanel Paris-Shanghai coïncide avec l’ouverture d’une boutique de la marque à Shanghai, au sein de l’hôtel Peninsula, qui bénéficiera de pièces inédites. Le marché chinois étant actuellement celui qui sauve l’industrie du luxe, il n’est pas surprenant que Shanghai soit cette année la destination de la collection Métiers d’Art (collection annuelle mettant en valeur le travail de sept maisons artisanales spécialisées rachetées par Chanel).

Pour l’occasion, Chanel a mis les petits plats dans les grands. Il faut dire que Karl Lagerfeld avait déjà frappé fort dans l’Empire du Milieu, avec son défilé Fendi sur la Muraille de Chine en 2007 (pour la collection printemps/été 2008). L’événement devait donc marquer les esprits. Pour cela, rien n’est trop beau, avec un court-métrage réalisé par Lagerfeld lui-même et un défilé sur un bateau spécialement construit pour l’occasion, autorisant en arrière-plan une vue sur le district de Pudong et ses fameux gratte-ciel (dont le Shanghai World Financial Center, le « décapsuleur » et la Perle de l’Orient).

Une présentation en grande pompe, c’est bien, mais qu’en est-il du contenu ? Déjà, voyons un peu tout ce qui concerne les vidéos. Chanel a réalisé un teasing en règle avec une dizaine de petits clips annonçant la collection. Et bien entendu, le fameux court-métrage signé Lagerfeld, intitulé « Paris-Shaghai, a Fantasy. The Trip That Coco Chanel Only Made in her dreams ». On y voit une Coco Chanel s’évadant par la pensée à diverses époques, à travers laquelle elle rencontre un couple d’ouvriers, Marlène Dietrich en Lily Shanghai dans le Shanghai Express ou encore l’empereur de Chine. Un court métrage qui sonne un peu trop naïvement pour qu’on y croie vraiment. Tout cela semble bien enjolivé et la scène où Coco Chanel parle chiffon avec l’ouvrière chinoise est à la limite du risible. Au moins est-il rigolo de voir une danoise (en l’occurrence Freja Beha Erichsen, qui clôt également le défilé de la collection) déguisée en chinoise, à la fois dans le rôle de l’ouvrière et celui de la courtisane.

Finalement, tout ceci n’est que du décorum et ce qui nous intéresse vraiment est la collection Paris-Shanghai. Et heureusement, celle-ci est bien plus convaincante que le voyage de Coco en Chine. La philosophie des collections Métiers d’Art est de mêler les inspirations parisiennes traditionnelles de Chanel à celles du pays-destination. Et il faut bien, le dire, c’est totalement réussi ! Karl Lagerfeld nous enchante, avec un ensemble de looks allant du « très Chanel » au « très chinois ». Partout l’inspiration de la culture chinoise s’y exprime par petites touches. Ici un col Mao, ici des dorures aux motifs orientaux… le tout mêlé aux traditionnels galons, chaînes et autres menus détails typiques de la Maison Chanel. Et le mieux, reste tout de même cette subtile et constante référence à la laque rouge, qui s’exprime sur quasiment toute la collection. Un rouge profond qui apparaît en élément de décoration ou en face cachée, ne se révélant que par le mouvement. L’élégance Chanel mêlée à la surprise. Et à propos de surprise, celle d’un képi kaki détourné avec les deux C entrelacés en lieu et place des l’étoile rouge n’est pas la moindre ! Ou comment transformer un élément typiquement communiste en une pièce affichant fièrement le symbole d’un luxe capitaliste. Tout le paradoxe chinois en un seul chapeau !

Chanel et Lagerfeld mêlent encore une fois élégance et inventivité. Une belle référence à la culture chinoise (culture réelle et on attend d’ailleurs avec impatience de voir émerger de grands créateurs chinois sur le devant de la scène internationale), vue d’un œil européen. Il est juste dommage que le court métrage de Lagerfeld soit si flatteur dans le mauvais sens du terme envers les chinois, ce qui met un peu trop en avant le côté marketing de la chose. Mais l’économie a ses raisons…

Pour voir le court-métrage et les vidéos montrant la préparation de la collection, le site Chanel Paris-Shanghai

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