Chroniques ordinaires Humeurs

Facebook

Le groupe « Tu sais que t’es un vrai parisien quand… » nous dit « ces derniers mois t’as plus entendu le mot « Facebook » que « merci » ou « bonjour » ». On n’est peut être pas tous parisiens, mais on fait tous le même constat, quitte à accorder plus d’importance à notre ordi qu’à notre chat.

« Inscris toi, y’a plein de choses à faire là dessus ». Et paf, entre deux cafés, la bombe était lancée. Un peu feignasse sur les bords, vous avez quand même attendu la version en français pour vous créer un compte. C’est pas exactement la guerre entre Shakespeare, ses copains anglophones et vous, mais faut pas pousser. Vous bousculez déjà vos habitudes internetiques avec un nouvel onglet, s’il faut en plus faire une place au traducteur de Voila, on n’est pas sortie. Trop de changement tue le changement.

Un compte en cours de création, première surprise. Comment ça « nom et prénom » ? Depuis quand est-ce que je ne peux plus être petite-scarabée-des-prés-du-75 ? Après avoir donné son nom, il faut également mentionner sa religion, sa situation conjugale, ses passions, sa date de naissance et son lieu d’origine. On parie combien que dans trois mois, il faudra donner son tour de poitrine et son numéro de sécu ?

Votre pudeur identitaire mise de côté, vous voilà sur une page magnifiquement vierge de toute « actualité » (oui, avec Facebook, actualité ne se résume plus au « Six Minutes »). Pour remédier à ça, vous commencez à chercher quelques uns de vos amis histoire de voir ce qu’ils ont fait de leur page. Note à ceux qui ne sont pas encore inscrits, créez-vous un compte lorsque vous savez vos futurs amis potentiels devant leurs écrans, au moins pour ne pas attendre 3 jours qu’ils « acceptent de devenir vos amis ». Ah. Le premier. Vous apprenez qu’en cette magnifique journée, à 18h51 très exactement, vous êtes maintenant amie avec Truc Bidule alors que vous vous connaissez depuis déjà quelques années. Un peu vexée mais pas complètement offusquée, vous entamez la lecture de son profil et de ses applications. Vous apprenez alors qu’il a 239 amis, appartient à près de 80 groupes, est à vendre pour $ 115,889, qu’une blondinette lui donne des surnoms débiles, que s’il passait le bac, il l’aurait avec mention, qu’en cliquant sur forward il peut découvrir tout et n’importe quoi et surtout qu’il y a plein de tests à faire, encore mieux que ceux de Biba !

Plus besoin de cocher les petites étoiles ou fleurs d’un magazine, de savoir que la réponse B de la questions 36 vaut 4,5 points… en 6 clics, c’est bon. Dès lors, vous découvrez que vous étiez faite pour les 60’s, que votre marque de cigarettes c’est Marlboro même en étant non fumeuse, que votre équivalent cocktail c’est le mojito, que si vous étiez un premier secrétaire soviétique, vous seriez Brejnev et ce, pas seulement pour les sourcils, que votre alter ego en matière de bonbons sont les dragibus, que vous finirez assassinée par vos amis parce que vos blagues sont trop pourries, que vous êtes comparables à l’Espagne, que vous êtes similaire à une guêpière rouge et noire et que avez toutes vos chances pour postuler à la ratp tant vous ressemblez à la ligne 14 du métro parisien… Alors, vous prenez note. Mine de rien, Facebook, c’est vachement mieux qu’un psychanalyste pour se comprendre et se connaître. Enfin, ne vous réjouissez pas trop vite, quand vous vous sentirez une âme de Twix comme en témoigne les résultats du dernier test, vous pourrez consulter. Ce sera d’ailleurs nécessaire ; on n’a jamais vu une barre de chocolat en sous-vêtements ultra glam aux couleurs du drapeau albanais avec, comme emballage, celles du drapeau hispanique. Mais si vous vivez entourée de telles friandises psychotiques, envoyez les photos au magazine qui transmettra.

Déjà 6 amis. Punaise, ils ont l’air nettement plus réactifs à vos invitations Facebook qu’à vos propositions de sorties à la salle de gym. Qu’importe puisque vous sentez poindre en vous une âme d’espionne, limite formée par le KGB. Qui est ami avec qui ? C’est quoi cette application Kiss ? Des messages sur le mur ? C’est qui cette blondinette ? Ah ouais ? Jules Monex n’est plus célibataire ? Si Facebook le dit…

Une fois le tour de vos amis fait et plein de nouveaux cancans à raconter autour d’un prochain café, ou, plus perfidement, en direct live sur MSN, vous commencez à rechercher d’anciens amis. Des très anciens même. Ceux avec qui vous cherchiez vos âges au fond des verres de la cantine, mangiez la cleopatra, pensiez que la patafix jaune de l’instit était du chewing gum et dont la sœur vous avait fait croire qu’en répétant 156 fois « Dame Blanche » devant un miroir à minuit, elle allait apparaître et vous croquer l’index gauche. 10, 20, ou 30 ans après, les choses ont changé. Enfants en préparation ou déjà bien présents, ANPE, ridules, prêt immo sur encore 422 mois… on est bien loin des paires de Kickers. Plus tributaire des goûts vestimentaires de vos parents, vous cliquez encore et encore histoire de vous remonter le moral en vous disant que votre vie n’est pas aussi pourrie que ça comparée à celles de vos anciens amis. Ces relations virtuelles durent entre une semaine et 10 jours, le temps d’échanger quelques vieilles photos de classes où on a l’impression que vous avez des rails de la RATP entre les dents. Souvenirs que vous préférez oublier, vous récupérez tout de même les fameuses photos à montrer à votre descendance pour les déculpabiliser de leur acné.

Ça vous amuse un temps. D’applications en applications, vous smilez de la même façon vos collègues de bureau que votre meilleure copine, vous faites des tests avec vos contacts pour connaître votre harmonie potentielle en colocation et pour savoir quel est votre pourcentage de compatibilité sexuelle. C’est lorsque vous voyez apparaître le nom de votre mère à ce test que vous décidez d’être raisonnable ; s’il y a un moyen de mieux se connaître, c’est de faire les tests de Save My Brain et de rejoindre le groupe nouvellement créé à la gloire de notre ami Jérôme, « Le fan club du génialissime créateur des tests de Save My Brain ».

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